Trump inquiète les Producteurs de lait
QUÉBEC — Tout comme les vaches, les producteurs de lait du Québec aimeraient produire leur lait « en paix ». L’élection de Donald Trump à la présidence des États-Unis et un éventuel déchirement de l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA) leur fait craindre le pire.
Le président des Producteurs de lait du Québec, Bruno Letendre, s’adressait aux délégués et producteurs réunis pour l’assemblée générale spéciale de son organisation le 17 novembre à Québec.
Il a rappelé que Donald Trump a promis de déchirer l’accord liant le Canada, les États-Unis et le Mexique. Dès le lendemain de son élection, a-t-il noté, l’ambassadeur du Canada et le premier ministre Trudeau se montraient disposés à rouvrir l’entente. Or, a-t-il souligné, la gestion de l’offre a été exclue de cet accord. « Il n’est pas question pour nous d’accepter qu’on la mette sur la table comme on l’a fait dans l’AECG [Accord économique et commercial global avec l’Union européenne] », a-t-il martelé. Au sujet des 17 700 tonnes de fromage concédées à l’Europe en vertu de l’AECG, Bruno Letendre a expliqué que cette concession allait se traduire par une perte de production de 180 millions de litres de lait. Cela équivaut, a-t-il mentionné, à la production annuelle du Lac-Saint-Jean ou à celle de la Nouvelle-Écosse.
Les 52 fromageries artisanales du Québec, a-t-il ajouté, ne produisent annuellement que 1 200 tonnes de fromage. Le double de ce tonnage de fromages fins, soit 2 667 tonnes, va se retrouver sur les tablettes des épiceries québécoises. « Il y a de fortes chances pour que ce secteur fragile soit parmi les plus touchés », prévoit Bruno Letendre.
Lunettes roses
Le président des Producteurs de lait se fait aussi railleur. Il contredit ceux qui prétendent que les fromagers québécois pourront profiter de l’ouverture du marché européen. Ce dernier, a-t-il révélé, importe moins de 1 % de sa production. « Ceux-là, s’est-il moqué, portent des lunettes roses ou en fument du bon… avant sa légalisation! »
Bruno Letendre a également répété sa déception à l’égard des 250 M$ sur cinq ans annoncés récemment par Ottawa. La somme sera versée pour soutenir les investissements des producteurs de lait à titre de compensation pour les importations supplémentaires de fromage. À son avis, il faudrait entre 750 M$ et 1 G$ pour indemniser les producteurs. « Les compensations, a-t-il déclaré, devraient aller à ceux qui souffriront des importations, les fromagers. Le gouvernement devrait être particulièrement sensible aux petites entreprises artisanales, qui sont les plus fragiles. »
Enfin, après avoir rappelé la conclusion d’une entente « historique » avec les transformateurs, Bruno Letendre a félicité la coopérative Agropur d’avoir adopté le nouveau logo de certification Lait de qualité. Ce logo, la vache bleue 2.0, apparaîtra sur les étiquettes des 800 produits d’Agropur à compter de l’an prochain. « C’est un pas important dans la valorisation de tous nos efforts », a-t-il affirmé, invitant les autres transformateurs canadiens à imiter le geste, ce qui a soulevé les applaudissements de la salle.
Il faudrait entre 750 M$ et 1 G$ pour indemniser les producteurs.