La transmission à l’homme inquiète
Le nombre d’humains exposés à la bactérie Salmonella Dublin augmente depuis trois ans. Au Laboratoire de santé publique du Québec, Sadjia Bekal, docteure en microbiologie, confirme que depuis le 1er janvier dernier, 14 cas humains d’infection à la Salmonella Dublin ont été déclarés. Il y en avait eu neuf en 2014 et sept en 2011, l’année de l’émergence de la bactérie.
La situation est jugée très sérieuse par l’Institut national de la santé publique du Québec (INSPQ). Devant la menace d’une épidémie, les autorités ont décidé il y a quelques semaines que chaque cas de Salmonella Dublin chez l’homme allait être étudié. En raison de la hausse de cas chez les animaux ces dernières années, Sadjia Bekal qualifie la Salmonella Dublin de « menace émergente sérieuse » pour l’humain.
« Pour l’instant, on ignore le véhicule de transmission de la bactérie entre les bovins et l’humain. Mais il faut le trouver, car on craint une éclosion. Si ça arrivait, ça pourrait causer beaucoup de dommages chez les humains », mentionne Mme Bekal.
La course contre la montre
Grâce aux analyses en laboratoire, les autorités savent que la souche de Salmonella Dublin trouvée jusqu’à maintenant chez les humains s’avère la même que chez les bovins infectés au Québec. Il faut donc découvrir comment la bactérie passe de l’animal à l’humain.
Des producteurs, des employés et des vétérinaires qui ont été en contact avec des animaux malades ont été infectés. Mais d’autres personnes qui n’étaient pas des agriculteurs l’ont également été. Ces gens ont-ils contracté la bactérie lors d’expositions agricoles ou en consommant du lait cru ou de la viande contaminée? « Ça pourrait aussi être dû à des fruits ou à des légumes contaminés lors de l’épandage de fumier contenant la bactérie, ou à de l’eau ayant été en contact avec le fumier », avance comme hypothèse Mme Bekal.
Faut-il paniquer?
Le vétérinaire-conseil des Producteurs de bovins du Québec, Rémi Laplante, se veut rassurant. Il juge qu’il n’y a pas de raison de s’affoler, d’une part parce que cette bactérie est particulièrement adaptée aux bovins et n’est pas épidémique chez l’homme, à moins qu’elle n’agisse avec d’autres agents pathogènes. D’autre part, les cas chez l’humain se révèlent somme toute peu nombreux pour l’instant. De plus, la situation semble stable. Sadjia Bekal mentionne par contre que dans l’éventualité où un aliment à large diffusion serait contaminé, il pourrait effectivement y avoir une épidémie dans la population. Voilà justement ce que l’État veut éviter en découvrant le plus rapidement possible le lien de transmission entre l’animal et l’humain.
Multirésistante
La souche de Salmonella Dublin trouvée jusqu’à maintenant chez les humains est multirésistante (résistante à plusieurs antibiotiques) et donc difficile à traiter. De plus, cette bactérie cause une infection invasive, c’està-dire qu’elle se répand par le sang vers d’autres organes du corps. Le taux de mortalité peut même être élevé chez les gens vulnérables, indique Sadjia Bekal. De fait, la diarrhée et les vomissements peuvent monter en intensité avec de la fièvre et d’autres complications, ce qui nécessiterait une hospitalisation. Parmi les 14 personnes contaminées jusqu’à maintenant, certaines ont effectivement dû être hospitalisées.
« On ignore le véhicule de transmission de la bactérie entre les bovins et l’humain. Mais il faut le trouver, car on craint une éclosion. » – Sadjia Bekal, INSPQ