La Terre de chez nous

Un feu et c’est le casse-tête

L’Abattoir Rousseau est parti en fumée, à Lingwick. Une perte qui met en lumière la fragilité du réseau des abattoirs régionaux et soulève la question de l’abattage clandestin.

- Avez-vous de l'informatio­n à ce sujet? tcn@laterre.ca // 450 679-8483, poste 7270 PIERRE-YVON BÉGIN pybegin@ laterre.ca @PierreYvon­Bgin

« Ce n’est pas croyable, l’impact que cet abattoir avait dans la région », témoigne Marie-Antoine Roy, producteur d’agneaux de Cookshire-Eaton. Cet abattoir multiespèc­e, ajoute-t-il, offrait non seulement la découpe, mais aussi la livraison chez les clients de Montréal. On pouvait même y faire l’abattage halal.

« On avait la chance d’avoir un abattoir de proximité, mentionne-t-il. L’Abattoir Rousseau traitait toutes les espèces : l’agneau, le boeuf, le cerf rouge, le chevreuil en automne et même le porc. Essayez donc de faire abattre deux porcs biologique­s pour voir! »

Les appels faits par LaTerre aux propriétai­res d’abattoirs dans la région lui donnent raison. « Tout le monde est booké par-dessus la tête », lance Gilles Bergeron, de l’Abattoir régional de Coaticook. Son entreprise, dit-il, abat deux jours et demi par semaine et ne dispose pas de la capacité de réfrigérat­ion ni du personnel pour en faire plus. Cette année plus que d’habitude, ses installati­ons fonctionne­nt à plein régime. « Le lendemain de l’incendie [de l’Abattoir Rousseau], le téléphone n’a pas dérougi », rapporte Gilles Bergeron. Il croit que les éle- veurs estriens n’auront d’autre choix que de s’éloigner jusqu’en Montérégie.

Même son de cloche à l’Abattoir Patrice Desmarais, de Weedon, qui confie qu’il ne peut faire davantage pour les éleveurs à la suite de l’incendie de l’Abattoir Rousseau. « Ce n’était pas le bon moment pour passer au feu, ajoute François Bourassa. Selon le MAPAQ, il n’y a pas de problème et il y a suffisamme­nt de structures [d’abattage]. J’ai fait le test et j’ai tenté de faire abattre une vache. On m’a dit qu’on allait me recevoir le 28 ou le 29 janvier! »

Projet pilote

Marie-Antoine Roy mentionne que l’Abattoir Rousseau cadrait parfaiteme­nt avec la volonté de développer les marchés de proximité au Québec. Depuis deux ans déjà, les différents intervenan­ts du secteur agroalimen­taire travaillen­t d’ailleurs à mettre en place un projet-pilote destiné à améliorer les structures d’abattage pour la vente en circuits courts.

François Bourassa, président de la Fédération de l’UPA-Estrie, révèle que l’idée a été soumise à l’invitation de l’ex-ministre de l’Agricultur­e. Le projet, dit-il, se heurte malheureus­ement au zèle des fonctionna­ires.

« Ils acceptent une exigence et ils en remettent deux autres », peste François Bourassa. Celui-ci fait maintenant valoir l’urgence d’agir, pressant le ministère de l’Agricultur­e, des Pêcheries et de l’Alimentati­on du Québec (MAPAQ) de déléguer un inspecteur à temps plein dans un autre abattoir de proximité, le temps de permettre de désengorge­r le réseau. L’automne constitue de loin la saison la plus occupée pour les abattoirs. « Même si ce n’est pas la bonne couleur sur les murs, ça ne fera mourir personne », prétend-il.

Le MAPAQ n’avait pas répliqué à ces informatio­ns au moment de mettre sous presse.

La perte d’un abattoir signifie souvent que le réseau de distributi­on de la viande doit être repensé. Un véritable casse-tête, particuliè­rement en automne alors que les abattoirs fonctionne­nt à plein régime en vue de la période des Fêtes.

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Marie-Antoine Roy
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