22 G$ US en subventions
Le lait américain pourrait bien représenter une concurrence déloyale s’il se retrouvait en plus grande quantité sur le marché canadien. Selon une nouvelle étude canadienne, les producteurs de lait américains reçoivent en effet des subventions qui totalisent 35,02 $ l’hectolitre, soit l’équivalent de 73 % des revenus qu’ils tirent du marché.
« Ce soutien extrêmement généreux est complètement ignoré », a indiqué Peter Clark, de la firme de consultants en commerce international Grey, Clark, Shih and Associates Limited, responsable de réaliser cette étude de 588 pages pour le compte des Producteurs laitiers du Canada (PLC).
« Les données du département américain de l’Agriculture [USDA] révèlent que depuis plus d’une décennie, les prix à la production du lait aux États-Unis ne couvrent pas les coûts de production », affirme Peter Clark. Selon l’étude, le fait que les transformateurs puissent acheter le lait à des prix inférieurs aux coûts de production présente un avantage concurrentiel considérable pour l’industrie laitière américaine.
Ces récents calculs montrent que le gouvernement américain a versé 22,2 G$ US en subventions directes et indirectes aux producteurs de lait en 2015. Ces chiffres découlent d’une analyse approfondie du Farm Bill de 2014 et de toutes les autres formes de subventions accessibles au secteur laitier.
Débat de chiffres
Après la publication de cette étude à laterre.ca, l’Institut économique de Montréal (IEDM) a rapidement signalé ce qu’il considère comme une méthodologie erronée. « C’est vrai qu’il y a des subventions pour le secteur laitier américain, mais 22 G$ US en un an, c’est un peu absurde », a mentionné Alexandre Moreau, analyste à l’IEDM.
L'analyste fait valoir qu’il n’est pas possible d’appliquer le pourcentage que représente la production laitière dans l’agriculture américaine (10,54 %) à l’ensemble des programmes de l’USDA, qui finance notamment le salaire de ses employés, des programmes forestiers et des programmes d’aide alimentaire ou de recherche qui ne servent pas aux producteurs laitiers. Alexandre Moreau fait valoir que l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) évaluait le soutien au secteur laitier américain à 4,4 G$ US en 2016.
« Les gens ne voient pas certaines subventions », rétorque Peter Clark, auteur de l’étude, qui rappelle que les producteurs laitiers américains tirent des bénéfices de plusieurs programmes au niveau local, étatique ou fédéral. Il souligne que certains de ceux-ci, comme les prêts à court terme ou l’irrigation, ne paraissent même pas dans le budget de l’USDA.
« Je n’inclus pas les subventions pour le sucre, le coton ou la foresterie », se défend par ailleurs Peter Clark, qui estime que son approche est « conservatrice » puisque les producteurs de lait sont, selon lui, plus souvent bénéficiaires que d’autres des programmes fédéraux. Par exemple, le programme américain d’aide alimentaire ( food
stamps) bénéficie aux producteurs de lait puisqu’il a été introduit pour éliminer les surplus. « C’est un gros chiffre [22 G$ US], mais l’argent est là », assure Peter Clark.