Ils abandonnent une production « prometteuse »
La production d’amélanches, ces délicieux fruits bleus, était le rêve de Patrice Gosselin et de Kathy Boudreault, mais ils ont décidé de raser toute leur plantation.
« Au début, le ministère de l’Agriculture nous encourageait à diversifier les cultures en misant sur des petits fruits comme les amélanches. C’était supposément une culture prometteuse, mais en vérité, c’était énormément d’ouvrage et nous n’avions pas assez de marchés pour écouler notre production. Je l’ai calculé et ça revenait à être payé 20 cents l’heure », dépeint M. Gosselin.
10 ans de labeur
Avec l’aide de leur famille respective, les Gosselin-Boudreault ont trimé dur pendant 10 ans. Ils ont commencé par défricher la terre « en enlevant les souches, une par une, à travers les mouches », se souvient Mme Boudreault. Ils se sont battus contre les maladies fongiques, les insectes ravageurs et les oiseaux. Une fois les fruits récoltés, la vente devenait un défi supplémentaire. Ils ont été jusqu’à placer des publicités sur les pare-brise des voitures dans les centres commerciaux et à faire déguster leurs fruits de roulotte en roulotte dans les campings, « mais la réalité nous a rattrapé. Ça prenait beaucoup de temps et c’était un gouffre financier », résume M. Gosselin.
Un déclin
Pierre-Olivier Martel, spécialiste en horticulture fruitière au bureau d’Alma du ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec (MAPAQ), confirme que d’autres agriculteurs ont mis un terme à leur expérience de culture des amélanches. « Il y en a beaucoup qui ont abandonné. En 2007, on comptait une quinzaine de producteurs; il en reste quatre aujourd’hui », précise l’agronome, expliquant que la culture s’est avérée plus difficile que prévu pour certains agriculteurs, en raison de défis phytosanitaires notam- ment. La mise en marché n’est pas toujours facile non plus, argue-t-il.
Patrice Gosselin affirme avoir reçu une subvention du ministère lors de l’implantation de sa production, mais il déplore le manque de soutien par la suite. « On n’a jamais revu personne du MAPAQ. Je pense que les spécialistes du ministère auraient dû nous aider à développer le marché », analyse l’agriculteur. Pierre-Olivier Martel réitère que les amélanches sont des fruits qui présentent de nombreux attraits. Ils sont peu acides et très bons au goût, qu’ils soient frais ou transformés. Leur culture est également très bien adaptée au climat de plusieurs régions du Québec, mais « en ce qui a trait aux marchés, nous ne pouvons pas les créer. Il faut que les producteurs fassent leur propre mise en marché et transforment eux-mêmes leurs fruits », juget-il. Il précise finalement que le marché de la surgélation n’est pas vraiment une solution puisque de gros producteurs d’amélanches de l’Ouest canadien sont très compétitifs dans ce créneau.