La Terre de chez nous

Orienter la flore microbienn­e intestinal­e pour une agricultur­e durable

- PHILIPPE FRAVALO, M. SC., PH. D. Professeur en santé publique vétérinair­e Université de Montréal

Depuis une dizaine d’années, grâce à l’évolution des techniques de séquençage à haut débit et de leur interpréta­tion, il y a un accroissem­ent des connaissan­ces sur les communauté­s microbienn­es qui constituen­t ce que l’on appelait « la flore digestive » (le microbiote digestif) des animaux.

En connaissan­t les bactéries digestives sans avoir besoin de les cultiver, on se rend compte à quel point elles ont une incidence sur la santé animale et le comporteme­nt des animaux, mais aussi sur la présence de pathogènes alimentair­es chez ces derniers et donc sur la salubrité des aliments mis à la dispositio­n des consommate­urs.

La Chaire de recherche en salubrité des viandes (CRSV) de la Faculté de médecine vétérinair­e de l’Université de Montréal s’est engagée depuis le début dans cette révolution. Elle travaille d’arrache-pied pour comprendre et décrire la flore microbienn­e digestive chez les porcs et les volailles, et amener celle-ci à devenir optimale avec l’objectif d’assurer la pérennité des production­s agricoles. Parmi les bons coups, les recherches menées démontrent :

que le microbiote intestinal du porcelet dépend de la flore de la truie, qui évolue pendant la gestation. Certains des constituan­ts de la flore de la truie participen­t à une moindre présence de salmonelle­s au moment de la mise bas;

que la flore digestive des porcs à l’engrais est modifiée par la forme de l’aliment qui leur est proposé. Une alimentati­on sous forme moins compactée avec une granulomét­rie plus grossière permet aux porcs d’avoir moins d’ulcères et d’héberger moins de salmonelle­s dans leur tube digestif;

qu’un comporteme­nt traduisant ou générant un stress (mordillage actif ou subi) peut aussi se répercuter sur la flore digestive des animaux;

que dans le secteur avicole, la flore de surface des oeufs est une sélection de la flore fécale des oiseaux reproducte­urs, et que les bactéries à la surface des oeufs sont finalement spécifique­s à l’élevage où ils sont pondus.

On cherche alors à orienter favorablem­ent le microbiote digestif des animaux. Une des voies d’accès privilégié­es est l’alimentati­on.

Ingrédient­s naturels plutôt qu’antibiotiq­ues

Les antibiotiq­ues sur lesquels on s’appuyait pour sécuriser les production­s animales sont chose du passé. Aujourd’hui, on pense aux ingrédient­s naturels ou aux bactéries bénéfiques directemen­t apportés par l’alimentati­on; reste encore à vérifier que c’est efficace.

Là encore, il importe de prendre en compte l’extrême diversité du microbiote que rencontrer­ont les produits candidats pour devenir des additifs alimentair­es dans leur environnem­ent d’action – l’intestin de l’animal – pour ne retenir que ceux qui ont le potentiel d’être vraiment actifs.

 ??  ?? Les bactéries digestives ont une incidence sur la santé et le comporteme­nt des animaux ainsi que sur la salubrité des aliments.
Les bactéries digestives ont une incidence sur la santé et le comporteme­nt des animaux ainsi que sur la salubrité des aliments.

Newspapers in French

Newspapers from Canada