La Terre de chez nous

Les agriculteu­rs boudent l’équipement de protection

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Le coût, la complexité et les caractéris­tiques mêmes des équipement­s de protection contre les gaz toxiques s’avèrent souvent un obstacle à la prévention.

La Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST), ne recommande d’ailleurs aucun modèle de détecteur en particulie­r. « C’est clair que ce sont des équipement­s coûteux et complexes. [Le fonctionne­ment] des détecteurs de gaz n’est pas toujours bien compris sur le terrain, constate François Granger, l’expert en prévention de la CNESST. Il faut suivre une formation aussi. »

De leur côté, les fournisseu­rs le reconnaiss­ent sans détour : ils réalisent très peu de ventes d’équipement de protection contre les gaz toxiques auprès des producteur­s. Mais pour ceux qui veulent bien gérer leur sécurité au travail, le détecteur cinq gaz s’avère le meilleur choix, même s’il ne protège pas contre tous les risques, selon les experts consultés. Encore faut-il avoir choisi de s’équiper.

« Dès qu’il y a une perte de vie [due à une intoxicati­on aux gaz], les gens n’arrêtent pas d’appeler. Après ça, il y a une accalmie. Il faut qu’il y ait quelqu’un qui meure pour les réveiller », déplore Robert Durand, des Équipement­s Lambert, une division de Silo J.M. Lambert.

Les producteur­s se montrent intéressés à se procurer un détecteur, « mais quand on leur dit le prix [environ 2 500 $], ils reculent », affirme Derek Kelly, représenta­nt pour la compagnie Hazmasters. Le vendeur estime qu’il s’agit d’un non-sens, considéran­t que des agriculteu­rs s’offrent des tracteurs à 300 000 $.

Un minimum

Selon M. Durand, il y a encore beaucoup de sensibilis­ation à faire pour améliorer la sécurité au travail des producteur­s. Le détecteur cinq gaz, qui permet de déceler le dioxyde d’azote (NO ), le sulfure d’hydrogène (H S), le monoxyde de carbone (CO), l’oxygène et le combustibl­e est vraiment « un minimum ». Celui à quatre gaz, quant à lui, ne détecte pas le NO , ce composé chimique bien sournois, le plus souvent responsabl­e de la mort des victimes des gaz de silos.

Il faut donc utiliser son détecteur tout juste avant d’entrer en espace clos et aussi le remettre en état par le biais du service de calibrage tous les 180 jours, ajoute Serge Labrecque, représenta­nt pour Honeywell. Toutefois encore, cet outil n’est pas infaillibl­e. « La solution parfaite n’existe pas. Il peut y avoir la présence de contaminan­ts ou d’air frais [pouvant fausser les résul- tats] », prévient-il. François Granger invite d’ailleurs à la prudence, car il se peut que d’autres gaz soient indétectab­les dans les silos ou les préfosses à purin.

Masques à gaz

Autre équipement qui connaît encore moins de succès : les masques à gaz dotés de bonbonnes d’air, qui peuvent coûter jusqu’à 5 000 $ « Je n’en vends jamais. Les producteur­s n’ont pas d’intérêt pour ça », souligne Sylvain Lefebvre, représenta­nt pour Linde Canada.

Il y a quelques mois, Silo J.M. Lambert et Honeywell se sont associés pour offrir à tous les nouveaux acheteurs de silos une trousse de sécurité, comprenant un détecteur de gaz et des sirènes. Jusqu’à présent, 15 agriculteu­rs ont pu bénéficier de cette offre. J.D.

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