La Terre de chez nous

Le lien de confiance rompu avec le fédéral

- JULIE MERCIER jumercier@ laterre.ca

Estimant avoir été sacrifiés au cours des trois derniers accords de libre-échange, les producteur­s de lait du Québec avouent leur manque de confiance à l’égard d’Ottawa, qui leur avait pourtant promis de préserver leur système de gestion de l’offre. À quelques mois de la campagne électorale fédérale, le gouverneme­nt libéral devra regagner la confiance des éleveurs.

« Ça fait trois fois. Ça va faire! » a martelé le président des Producteur­s de lait du Québec (PLQ), Bruno Letendre, à la rencontre semi-annuelle de l’organisati­on, le 21 novembre. Dans le cas de l’AEUMC, les PLQ estiment les accès supplément­aires à 3,9 % de la production canadienne, sans compter l’ingérence des États-Unis dans la politique laitière nationale, notamment dans l’abolition de la classe 7. « Certains articles de l’entente sont préoccupan­ts, a résumé Alain Bourbeau, le directeur général des Producteur­s. Le niveau de confiance à l’égard du gouverneme­nt n’est pas à son sommet. »

Ces propos ont trouvé écho chez les délégués. « Je n’ai plus confiance en ce gouverneme­nt. […] Pour les compensati­ons, je ne suis pas rassuré. Il faut se faire respecter. Trop, c’est trop », a lancé Yvon Boucher, président des Producteur­s de lait de la Montérégie-Est. « Les compensati­ons, je n’y crois pas. Cette entente-là, c’est la fin de la gestion de l’offre », a déclaré Michelle Soucy, productric­e de la relève.

« C’est par votre discipline et vos investisse­ments que le gouverneme­nt n’a pas eu à soutenir la production laitière », a poursuivi le président de l’Union des producteur­s agricoles (UPA), Marcel Groleau, qui croit que les compensati­ons « complètes et justes » promises par les libéraux compteront parmi les enjeux de la prochaine campagne électorale fédérale au Québec. « Votre pouvoir, il est là. Le gouverneme­nt a pris des engagement­s! Qu’il les respecte sinon il y aura un prix à payer », a lancé M. Groleau.

Des milliards en compensati­ons

Les PLQ évaluent les pertes liées aux trois derniers accords de commerce à environ 450 M$ par année. Pour l’AEUMC, les dommages iront en s’intensifia­nt sur une période de 19 ans. De plus, ces estimation­s excluent la disparitio­n de la classe 7, les plafonds aux exportatio­ns canadienne­s ainsi que les pertes des transforma­teurs. « On ne parle pas de quelques centaines de millions de dollars, mais de plusieurs milliards », a souligné Alain Bourbeau. À titre de comparaiso­n, en 2015, le gouverneme­nt conservate­ur de l’époque avait annoncé de l’aide de plus de 4 G$ pour dédommager l’industrie laitière pour le Partenaria­t transpacif­ique et l’entente avec l’Union européenne.

Ottawa a récemment annoncé qu’il mettrait en place des groupes de travail concernant les futures mesures de compensati­ons. Ces comités regroupero­nt des représenta­nts du fédéral, des éleveurs et des transforma­teurs. Les Producteur­s laitiers du Canada (PLC) se sont entendus sur une délégation de 14 personnes : trois du Québec, trois de l’Ontario, trois de l’ouest du pays, trois des Maritimes et deux de l’organisme fédéral.

L’AEUMC pourrait entrer en vigueur dans la 2e moitié de 2019. Pour leur part, les PLQ ne ferment pas la porte à une contestati­on légale. « Ce n’est pas si clair, mais on fait les démarches pour vérifier cet aspect-là », a précisé Alain Bourbeau, leur directeur général.

« Je me sens comme le petit de la classe qu’on intimide parce qu’il est tranquille. » – Yvon Boucher

 ??  ?? « On n’est pas à vendre, mais on nous a vendus contre notre gré. Les compensati­ons ne sont pas des subvention­s », a rappelé le directeur général des Producteur­s de lait du Québec, Alain Bourbeau, en compagnie de son président, Bruno Letendre.
« On n’est pas à vendre, mais on nous a vendus contre notre gré. Les compensati­ons ne sont pas des subvention­s », a rappelé le directeur général des Producteur­s de lait du Québec, Alain Bourbeau, en compagnie de son président, Bruno Letendre.

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