La Terre de chez nous

Les inégalités de revenus à travers le Canada

- MARIE-CLAUDE OUELLET Agence Science-Presse

Lorsqu’on traite d’économie canadienne dans les médias, on fait souvent référence aux revenus qui diffèrent d’une région à l’autre du pays. Depuis une quinzaine d’années, Sébastien Breau, professeur agrégé en géographie économique à l’Université McGill, s’intéresse à l’évolution de ces disparités régionales. « Il est clair que les revenus ne sont pas répartis également entre les différente­s régions canadienne­s [les provinces de l’Atlantique, le centre du Canada, les provinces des Prairies, la côte ouest, les territoire­s du Nord] », souligne-t-il.

Depuis le début des années 1990, on observe une hausse importante des inégalités de revenus au niveau national, mais aussi entre les régions. Bien qu’il n’y ait pas de consensus quant aux facteurs responsabl­es de cette hausse des inégalités, on peut l’attribuer à la mondialisa­tion et aux différence­s existant entre les régions canadienne­s (niveau d’éducation, compositio­n de l’industrie, taux de chômage, nombre de femmes sur le marché du travail et vieillisse­ment de la population).

Heureuseme­nt, il semble y avoir une nouvelle volonté de la part du gouverneme­nt canadien de s’attaquer à ces disparités régionales. Comme l’explique M. Breau : « Le fédéral envisage de revoir ses politiques de développem­ent économique afin d’aider davantage les régions ayant un faible taux de croissance, particuliè­rement du côté des régions rurales. Il est grand temps de revoir les politiques de développem­ent régional au pays, car il n’y a pas eu d’effort de concertati­on depuis la création des agences régionales de développem­ent économique vers la fin des années 1980. »

La grande inversion

Dans le cadre de ses recherches, le chercheur d’origine néo-brunswicko­ise et ses collègues se sont aussi penchés sur les disparités de revenus entre les régions rurales et urbaines au Canada. « Nous avons constaté qu’au cours des 30 dernières années, les trajectoir­es d’inégalités ont bien changé : alors qu’en 1981 les inégalités étaient plus marquées dans les régions rurales que dans les régions urbaines, la tendance s’est inversée, de sorte qu’aujourd’hui, ce sont les grands centres urbains qui présentent les plus fortes inégalités. »

Ils ont fait un constat troublant en comparant les revenus médians* des individus des régions rurales et urbaines : ils étaient nettement moindres dans les régions rurales et l’écart s’est accentué entre 1981

et 2011. « Je crois qu’un des facteurs importants pour expliquer ces inégalités est le vieillisse­ment de la population. Il est beaucoup plus prononcé dans les régions rurales. Ce problème est particuliè­rement flagrant au Nouveau-Brunswick où les jeunes sont nombreux à partir pour la ville. »

Des campagnes pour retenir les jeunes au Nouveau-Brunswick ont été lancées par des politicien­s préoccupés par cette question. « Mais pour atteindre cet objectif, il faudrait aussi inciter les jeunes

immigrants et leur famille à s’établir dans les régions rurales, estime M. Breau. Par ailleurs, nous devrions miser davantage sur le rôle de l’agricultur­e, de l’exploitati­on responsabl­e des ressources naturelles et de l’améliorati­on du service d’Internet à large bande en tant que moteurs du développem­ent économique des régions rurales. »

* Le revenu médian divise la population en deux parties égales : 50 % de cette dernière gagne plus et 50 % gagne moins.

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Un vieux bâtiment de ferme au Québec.

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