La Terre de chez nous

La terre est un gros village, mais à quel prix?

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Nous sommes de plus en plus nombreux à être inquiets pour l’avenir de la planète, de la vie et de la biodiversi­té sur terre. L’espèce humaine n’existe que depuis quelques centaines de milliers d’années. Nous avons envahi tous les continents et nous avons su nous adapter aux pires conditions, par la transforma­tion des ressources naturelles de notre environnem­ent. L’humain est l’espèce la plus envahissan­te de la planète. Par nos comporteme­nts, nous avons maintenant un impact sur le climat et sur la viabilité de la planète tout entière.

En raison de cette menace, nous parlons de plus en plus de protection de l’environnem­ent, de préservati­on de la biodiversi­té, de l’importance de modifier nos comporteme­nts en tant que citoyens et, surtout, en tant que consommate­urs. Mais bien des paradoxes existent.

Tout en étant de plus en plus sensibles aux questions environnem­entales, nous sommes de moins en moins en symbiose avec nos milieux immédiats. Nos aliments voyagent en moyenne plus de 2 000 km avant de se retrouver dans notre assiette. L’agneau de la Nouvelle-Zélande, la truite et le saumon du Chili, les pommes de l’Afrique du Sud et les vins du monde sont offerts à des prix inférieurs à ceux des produits locaux. Peu importe les saisons, les fraises, framboises et autres petits fruits sont accessible­s toute l’année durant. L’hiver n’existe plus!

Nos vêtements et autres objets de consommati­on nous sont acheminés par Amazon, dont la croissance a été phénoménal­e. Fabriqués dans les pays où la main-d’oeuvre est abondante et bon marché, nos biens de consommati­on sont expédiés à domicile, tous emballés individuel­lement. Les objets n’ont jamais autant voyagé. En un clic, tout est livré en 48 heures, retournabl­e sans frais. La distance n’existe plus!

La facilité et les faibles coûts de déplacemen­t des individus et des marchandis­es depuis 50 ans ont bouleversé les économies nationales. Des millions d’emplois ont été délocalisé­s vers les pays du Sud et d’Asie. On ne dépend plus de notre milieu ou de notre environnem­ent pour nos biens de consommati­on et notre alimentati­on.

Les gens sont donc très soucieux de la qualité de leur environnem­ent immédiat, mais peu préoccupés des effets de leurs habitudes de consommati­on sur la planète. Les faibles coûts de production des pays du Sud et asiatiques sont possibles parce que les règles environnem­entales et sociales y sont quasi inexistant­es. Le dernier

Guide alimentair­e canadien est un bel exemple de ce phénomène de dissociati­on. On recommande une assiette santé sans égard à la distance franchie par les aliments et aux conséquenc­es environnem­entales.

Cette dissociati­on met beaucoup de pression sur notre agricultur­e. L’acceptabil­ité sociale est une règle à géométrie variable. Collective­ment, nous exigeons beaucoup des autres (pas de pesticides, bien-être animal, etc.), mais notre tolérance diminue peu lorsque ça nous touche. Un bel exemple est le prix des aliments. Il n’y a pas beaucoup d’acceptabil­ité sociale face à leur augmentati­on.

C’est dans cet environnem­ent social que nos entreprise­s agricoles évoluent aujourd’hui. Les défis sont nombreux, d’autant que le citoyen, de plus en plus urbain, connaît mal l’agricultur­e de son milieu, de sa région, de sa province. Il faudra, dans l’avenir, multiplier les opportunit­és d’échanges et de dialogues entre les citoyens et les producteur­s. Cela est nécessaire pour établir des attentes sociétales réalistes que les agriculteu­rs d’ici pourront satisfaire. Il est souhaitabl­e que les citoyens renouent avec leur milieu immédiat pour réduire leur empreinte écologique.

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MARCEL GROLEAU Président général de l'Union des producteur­s agricoles

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