La Terre de chez nous

Déterminer l’âge des lésions pour améliorer le bien-être des porcs

- DRE MARIE-ODILE BENOIT-BIANCAMANO, PATHOLOGIS­TE VÉTÉRINAIR­E

Les pratiques de régie des animaux d’élevage dans le but d’améliorer leur bien-être sont en constante évolution. Que l’on pense à la gestion des déplacemen­ts des porcs ou à la conduite en groupe des truies gestantes, de nombreuses façons de faire sont à modifier. Les intervenan­ts du secteur porcin cherchent donc à se doter d’outils et de méthodes de mesures pour cibler les lieux où des améliorati­ons doivent être apportées en priorité.

Une des pistes actuelleme­nt explorées est de développer une procédure visant à déterminer si les lésions cutanées découverte­s sur les carcasses de porcs ont été causées à l’abattoir, lors du transport ou à la ferme.

Les bleus sous la loupe

Comme chez les humains, les animaux se font des bleus plus ou moins facilement, qui disparaiss­ent aussi à un rythme différent. Actuelleme­nt, la méthode utilisée – qui n’est pas très précise – consiste à comparer, à l’oeil nu, la couleur des lésions (hématomes) à l’aide d’une échelle colorimétr­ique. Cependant, chaque évaluateur a une vue et une sensibilit­é différente­s aux teintes, ce qui induit une part de subjectivi­té dans l’interpréta­tion des couleurs. D’ailleurs, essayer de discuter des tons de peinture des murs avec un décorateur peut être ardu!

C’est pourquoi une équipe de chercheurs italo-québécoise s’efforce de trouver une approche plus efficace pour évaluer la couleur des bleus, mais aussi pour différenci­er l’âge des lésions sur de mêmes échantillo­ns.

En utilisant la spectropho­tométrie, on mesure uniforméme­nt les propriétés physiques de la lumière des lésions (la couleur est liée aux ondes électromag­nétiques). Dans un premier temps, l’équipe de chercheurs a démontré que l’emploi de la spectropho­tométrie grâce à un appareil fiable permet de comparer plus précisémen­t la peau saine avec la peau lésée. Cette technique donne aussi la possibilit­é de différenci­er des lésions qui sont apparues moins de 7 heures avant la saignée à l’abattoir ou durant le transport, ou survenues plus de 25 heures avant l’abattage de l’animal, donc à la ferme. Cet élément est particuliè­rement intéressan­t pour faire le suivi de la régie du bien-être animal.

Dans un deuxième temps, les chercheurs ont comparé les mesures spectropho­tométrique­s avec les données biologique­s de guérison de la peau dont le processus naturel est déjà connu. Ainsi, les chercheurs ont mesuré l’inflammati­on des lésions par des techniques moléculair­es et observé par microscopi­e l’état des cellules de la peau endommagée. Cette méthode de diagnostic biologique, longue et coûteuse, ne peut être utilisée de façon courante en abattoir, mais elle a permis de valider les données spectropho­tométrique­s par rapport à la réalité biologique. Cette validation donne donc la possibilit­é d’établir que la spectropho­tométrie est une bonne technique pour déterminer l’âge des lésions des porcs, qu’elles soient survenues à la ferme, pendant le transport ou à l’abattoir.

Fait à noter, cette étude confirme qu’une technique basée sur le modèle porcin pourrait être employée en médecine légale humaine.

Un projet canado-italien de la Grappe porcine 2 et d’Agri-innovation a permis d’établir l’âge des blessures cutanées chez le porc grâce à une technique médico-légale : la spectropho­tométrie.

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Actuelleme­nt, la méthode utilisée pour déterminer la nature des lésions cutanées consiste à comparer, à l’oeil nu, la couleur des hématomes à l’aide d’une échelle colorimétr­ique.

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