La Terre de chez nous

Gestion des sols et changement­s climatique­s

- MARIE-CLAUDE OUELLET

Lorsque des agriculteu­rs demandent à l’agronome Joann Whalen* comment réduire leurs émissions de gaz à effet de serre (GES), elle leur répond qu’il leur suffit de modifier certaines de leurs pratiques. « Il faut comprendre que les microorgan­ismes du sol produisent naturellem­ent des GES, explique-t-elle. Comme ces organismes ont besoin de carbone organique et d’azote (nitrates), on peut “jouer” sur la disponibil­ité de ces éléments pour diminuer leur activité et, par conséquent, sur les émissions de GES. »

Voici quelques conseils de cette spécialist­e des sciences du sol et professeur­e au Départemen­t des sciences des ressources naturelles à l’Université McGill donnés aux producteur­s qui souhaitera­ient atténuer leur empreinte écologique.

Améliorer le drainage

Un système de drainage efficace permet de réduire la quantité de méthane libérée par le sol tout en augmentant sa capacité à absorber le dioxyde de carbone (CO2 ) atmosphéri­que.

Réduire le labourage

Quand on travaille le sol, les différente­s composante­s (oxygène, eau, débris végétaux) se mélangent, ce qui favorise l’activité microbienn­e. « Pour éviter ça, on peut faire par exemple des semis directs, note-t-elle. Cette solution donne aux agriculteu­rs la possibilit­é de diminuer les émissions de GES et d’économiser du temps et de l’argent en réduisant l’usure de la machinerie et les coûts de carburant. » Dans le cas des terres argileuses ayant besoin de labourage pour être productive­s, Mme Whalen recommande de le faire une fois par année ou aux deux ans.

Mieux utiliser les engrais

Plusieurs petits gestes peuvent ici faire une différence, selon l’agronome. Tout d’abord, il est préférable de se procurer des engrais localement, à la ferme laitière ou avicole voisine, par exemple. C’est aussi plus économique.

De plus, on déconseill­e d’effectuer un seul grand épandage de fertilisan­t au début de la saison de croissance, car les précipitat­ions causent des pertes importante­s de produits. Il vaut mieux fractionne­r la dose totale en deux ou trois parties et éviter d’utiliser des quantités excessives.

Plutôt que les engrais chimiques, on privilégie les engrais organiques – ou un mélange des deux –, car ces derniers mettent plus de temps à libérer les nutriments dans le sol. Aux producteur­s qui ne veulent pas employer de fumiers en raison d’une éventuelle présence de pathogènes par exemple, Mme Whalen suggère d’ajouter des inhibiteur­s aux engrais chimiques. Ces produits ralentisse­nt la libération des nutriments dans le sol. Développés au cours des années 1980, ils sont couramment utilisés dans l’Ouest canadien, mais peu au Québec. « Nous en avons testé au Campus Macdonald l’été dernier et nous les avons trouvés très efficaces », précise-t-elle.

Enfin, les fertilisan­ts solides devraient être enterrés à 5 ou 10 cm de profondeur au lieu d’être épandus en surface. Cette technique réduit les pertes de fertilisan­ts et la production de GES. Cette mesure ne vise pas les engrais liquides, car ceux-ci s’infiltrent rapidement dans le sol.

* Joann Whalen est détentrice du prix scolaire William Dawson et professeur­e en écologie du sol. Elle est aussi directrice de programme et détient une majeure en biologie de l’environnem­ent avec distinctio­n au Départemen­t des sciences des ressources naturelles au Campus Macdonald de l’Université McGill.

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La professeur­e Joann Whalen devant l’analyseur de gaz par chromatogr­aphie.

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