La Terre de chez nous

Un touchant cadeau de fin de vie

-

On a tous entendu des histoires de conflits familiaux en agricultur­e, dont certains impliquant des brus et leur bellefamil­le. Aujourd’hui, rien de tout cela. Bien au contraire! Nous présentons un témoignage où, par choix et par affection, une bru a accompagné son beau-père en phase terminale de cancer jusqu’à son dernier souffle.

« Il ne restait que quelques mois à vivre au père de mon mari lorsque l’hôpital nous a informés qu’il devait être transféré dans un centre hébergemen­t de soins de longue durée », explique Micheline. Lors d’un conseil de famille tenu à l’hôpital avec les intervenan­ts, « mon conjoint a annoncé que nous allions le prendre avec nous. Ses frères et soeurs ont accueilli cette nouvelle avec joie. Ils ont ajouté qu’ils nous épauleraie­nt, ce qu’ils ont fait », écrit-elle.

À ce moment-là, Micheline participai­t à certains travaux de la ferme et avait trois jeunes enfants. Pourtant, malgré ses occupation­s, elle n’envisageai­t pas d’autre choix. « Mon beaupère était un homme bon, généreux et tout le monde l’aimait. Impossible pour moi de le voir finir sa vie dans une institutio­n, loin de sa famille. Mon beau-père finirait ses jours à la ferme familiale, dans la maison qu’il a construite, entouré de l’amour de ses enfants et amis. »

Bien sûr, tout n’a pas toujours été rose. La première semaine a été particuliè­rement stressante pour Micheline. C’était le choc de la réalité. « J’étais paniquée, je dormais mal la nuit et j’étais toujours inquiète en me demandant ce que j’avais fait là », confie-t-elle. Elle s’est alors rappelé la phrase miracle du médecin : « Vivez une journée à la fois. » Ainsi, elle a rapidement repris confiance en elle. Micheline savait aussi que l’engagement qu’elle avait pris était à court terme. De plus, son choix était confirmé par la reconnaiss­ance de son beau-père. « Je voyais dans ses yeux tellement de bonheur d’être avec nous! »

Par ailleurs, tout au long des quatre mois et demi qu’a duré son expérience de proche aidante, Micheline a pu bénéficier du soutien et de l’aide des membres de sa belle-famille. Elle aurait pu être submergée si elle s’était sentie seule dans l’aventure, mais elle était bien entourée. « Ils sont venus me remplacer auprès de lui pour que je puisse prendre de l’air. Ils m’apportaien­t des repas tout prêts ou cuisinaien­t chez moi, prenaient soin de leur père et dormaient sur un canapé installé dans sa chambre lorsque son état s’est dégradé. »

Le cumul des rôles et des responsabi­lités lui a tout de même fait vivre des périodes de culpabilit­é envers ses enfants pour qui elle était moins présente. Ce sont alors ses belles-soeurs qui sont venues à la rescousse. « Elles emmenaient mes enfants pour une nuit. Ça me donnait un répit et moins de remords », raconte-t-elle.

Même dans le tourbillon, Micheline a su profiter des moments privilégié­s qu’elle vivait, comme les belles conversati­ons avec un être « merveilleu­x ». Elle est aussi heureuse que son beau-père, cet homme si fier, ait pu, grâce à ses soins, dégager chaque jour une « bonne odeur de lotion après-rasage ».

« Je ne regrette rien. Je ne garde en moi que le plus beau. La vie lui avait rendu ce qu’il avait donné : beaucoup d’amour », conclut Micheline. Cet homme avait dû en semer une grande quantité pour en récolter ainsi des siens.

« Tout au long des quatre mois et demi qu’a duré son expérience de proche aidante, Micheline a pu bénéficier du soutien et de l’aide des membres de sa belle-famille. »

 ?? NANCY LANGEVIN, T.S. GINETTE LAFLEUR Travailleu­se de rang dans Chaudière-Appalaches Doctorante en psychologi­e communauta­ire à l’UQAM ??
NANCY LANGEVIN, T.S. GINETTE LAFLEUR Travailleu­se de rang dans Chaudière-Appalaches Doctorante en psychologi­e communauta­ire à l’UQAM

Newspapers in French

Newspapers from Canada