La Terre de chez nous

Fiscalité foncière agricole : les producteur­s s’impatiente­nt

- MARCEL GROLEAU Président général de l'Union des producteur­s agricoles

Chaque année, la Confédérat­ion rencontre les conseils d’administra­tion des groupes affiliés à l’Union. Nous faisons le tour de nos principaux dossiers et discutons des enjeux plus spécifique­s à chacun des groupes. Naturellem­ent, ces enjeux varient d’une région et d’un secteur à l’autre, mais cette année, un sujet ressort dans presque toutes nos rencontres. Il s’agit de la fiscalité foncière agricole.

Les nouveaux rôles d’évaluation dans plusieurs municipali­tés de Lanaudière, de la Montérégie, des Basses-Laurentide­s, de Laval, du Centre-du-Québec, de la ChaudièreA­ppalaches et de l’Estrie démontrent que le problème est généralisé. Cette semaine, les agriculteu­rs de Compton en Estrie se sont réunis devant les bureaux de la municipali­té pour dénoncer la situation. D’autres groupes de producteur­s se demandent comment se faire entendre à la fois par leur municipali­té et le gouverneme­nt.

Nous savons maintenant que les délais législatif­s ne permettron­t pas d’apporter de solution avant 2021. Le dépôt d’un projet de loi l’automne prochain et les délais habituels pour son adoption ne permettron­t pas son applicatio­n dès l’année 2020. C’est pourquoi nous demandons un gel des taxes foncières agricoles d’ici l’applicatio­n du projet de loi en 2021. Cette année, il en coûte 17 M$ de plus à l’État, incluant les 9 M$ supplément­aires pris à même le budget du ministère de l’Agricultur­e, des Pêcheries et de l’Alimentati­on (MAPAQ). L’an prochain, le MAPAQ devrait débourser un montant supplément­aire encore plus important, tout comme les producteur­s.

Les coûts supplément­aires ne sont attribuabl­es qu’à la hausse des rôles d’évaluation, ceux-ci étant principale­ment basés sur les transactio­ns de terres à la marge ou acquises par des promoteurs immobilier­s au pourtour des communauté­s urbaines. Si l’on ne trouve pas une façon de limiter la valeur taxable du foncier agricole, on ne fait que remettre le problème à plus tard. La pression sur la valeur des terres va demeurer et même s’accroître. Plus la valeur foncière augmente, plus il est périlleux, pour les jeunes, de démarrer une entreprise ou de prendre la relève de la ferme familiale. Vendre devient plus intéressan­t qu’acheter, et ce n’est pas de bon augure pour l’avenir de l’agricultur­e familiale.

L’argent alloué aux municipali­tés par l’entremise du Programme de crédit de taxes agricoles (PCTFA) n’est pas structuran­t pour le secteur. Il est inquiétant d’entendre que pour certains, ce programme s’ajoute aux autres interventi­ons du gouverneme­nt pour le secteur agricole. L’Ontario applique un taux distinct aux terres et compense les municipali­tés par le biais de son pacte fiscal. Le crédit ainsi obtenu par le taux distinct ne s’additionne pas aux interventi­ons du ministère ontarien de l’Agricultur­e à l’endroit des fermes et n’est pas calculé en tant que soutien agricole.

Nous sommes à un tournant. Lors de la campagne électorale, le gouverneme­nt de François Legault a pris l’engagement de régler cette situation. Les demi-solutions nous ont amenés où nous en sommes aujourd’hui. La sourde oreille des municipali­tés (seulement 57 d’entre elles appliquent un taux distinct), qui prétendent que cet enjeu ne les concerne pas et qu’il revient au gouverneme­nt de le régler, démontre qu’une partie de la solution devra sans doute être imposée.

L’Union demande depuis longtemps de s’asseoir avec les unions municipale­s, le MAPAQ et le ministère des Affaires municipale­s et de l’Habitation pour trouver une solution durable. Cette solution passe sans doute par des aménagemen­ts au pacte fiscal. Nous comprenons très bien que les municipali­tés ont besoin de financemen­t, mais on ne peut continuer de financer les services aux citoyens au moyen du PCTFA.

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