Produits du Québec: vraiment?
Chaque été, la période de transition entre les arrivages de fruits et légumes du Québec et ceux d’ailleurs est particulièrement propice aux erreurs d’affichage chez les détaillants.
Acheter, c’est voter, dit le slogan popularisé par l’écologiste Laure Waridel. Or, cet objectif ne tient plus la route lorsque le consommateur est induit en erreur sur la provenance de ses fruits et légumes. Malgré toute la bonne volonté des commerçants, des irrégularités d’affichage persistent, tant à l’épicerie qu’au marché public.
Durant chaque saison des récoltes, l’histoire se répète à l’épicerie : les erreurs d’affichage se multiplient entre les fruits et les légumes du Québec et ceux qui proviennent d’ailleurs, notamment de l’Ontario et des États-Unis. Pourquoi ce problème persiste-t-il?
Prenons l’exemple des fraises. Au moment où celles du Québec parvenaient tranquillement aux magasins en raison du retard causé par dame Nature, les épiciers recevaient d’autres arrivages de l’extérieur pour remplir leurs étalages. « Si on a trois arrivages différents dans la même journée et qu’un seul est québécois, malheureusement, il peut y avoir des erreurs d’affichage », avance Pierre-Alexandre Blouin, président de l’Association des détaillants en alimentation du Québec.
Le règlement actuel exige qu’une étiquette spécifie sur chaque produit la provenance des fruits et des légumes emballés ou en vrac. À quelques reprises, La Terre a toutefois pu constater un décalage entre le lieu d’origine inscrit sur l’affiche de prix et celui indiqué sur l’étiquette individuelle. Ainsi, des asperges, de la laitue et des bleuets ont été annoncés par des commerçants comme étant des produits du Québec, alors que ce n’était pas le cas (voir l’encadré au bas de la page 5).
Défi logistique
La logistique en magasin n’est pas évidente avec le roulement des quarts de travail et des nombreux commis à temps partiel qui « ne sont pas toujours très formés », se défend M. Blouin. Si certains détaillants parviennent à bien indiquer la provenance des produits d’ici, d’autres ont encore beaucoup de travail à faire en ce sens, observe-t-il.
« On est aussi en pénurie de main-d’oeuvre dans les magasins. Les compagnies font leur possible et sont bien conscientes de ça », ajoute Mario Lalancette, directeur des communications de l’Association québécoise de la distribution de fruits et légumes.
Le directeur général de l’Association des producteurs maraîchers du Québec, Jocelyn St-Denis, reconnaît qu’il y a un « défi d’exécution » en magasin, surtout pour les aliments en vrac. « Mais ce n’est pas une excuse, poursuit-il. Quand la boîte arrive chez le détaillant, la provenance est indiquée. Alors si le commerçant veut se donner la peine de faire le travail pour respecter les consommateurs, il a les outils en main. »
Au nom des détaillants, Alexandre Blouin renvoie plutôt la balle aux maraîchers. « Si l’entreprise met son étiquette sur chaque tomate, par exemple, le problème est réglé. Le vrac, c’est plus complexe. […] Plus l’affichage est fait en amont, plus c’est facile pour nous. »
Aliments du Québec, une solution?
D’ailleurs, M. Blouin croit que les maraîchers devraient utiliser davantage la certification Aliments du Québec. Cette « marque repère » garantit aux consommateurs un achat local.
Il y a toutefois des frais annuels rattachés à cette identification pour les maraîchers, allant de 175 $ pour les entreprises de 1 à 10 employés jusqu’à 375 $ pour celles de 26 à 50 travailleurs. Bien que ce coût ne soit pas « énorme », peu d’entre eux sont prêts à l’assumer, remarque Marie Beaudry, directrice générale d’Aliments du Québec. L’organisme continue à faire des représentations auprès de diverses associations maraîchères, convaincu que la marque et le logo sont facilement repérables par les consommateurs qui privilégient les produits d’ici.
Les fraises d’ici se retrouvent parfois aux côtés de celles des États-Unis sur un étalage où il est mentionné que les produits proviennent uniquement du Québec.