La Terre de chez nous

Le rêve brisé d’une productric­e

- MARTIN MÉNARD mmenard@ laterre.ca

Maude Gouin Huot a démarré sa ferme laitière en 2010 dans une étable louée au Lac-Saint-Jean. Épuisée et à bout de ressources, elle vient de prendre la difficile décision de mettre fin à son projet. « J’ai tenu ça à bout de bras pendant neuf ans. Je travaillai­s sept jours sur sept, souvent 15 heures par jour. Mais là, c’est terminé. Je n’avais plus le choix. J’ai tout vendu en novembre dernier », ditelle. L’ex-propriétai­re de la Ferme Gouin Huot ajoute du même souffle : « L’agricultur­e est un rêve brisé. »

Un dossier facile à monter

À 24 ans, Maude Gouin Huot détenait un diplôme en production animale de l’Institut de technologi­e agroalimen­taire (ITA) et avait acquis quatre années d’expérience comme ouvrière agricole. Elle rêvait de posséder sa propre ferme laitière. Elle a donc eu recours au programme d’aide au démarrage des Producteur­s de lait du Québec (PLQ) et de La Financière agricole du Québec. « Je leur ai dit que je ne provenais pas du milieu agricole et que je n’avais pas une maudite cenne. Ils m’ont répondu : “Pas de problème!” J’ai monté mon dossier et en un an, j’avais un quota de 12 kilos et un prêt de 500 000 $ de la Financière », mentionne Maude. Elle a acheté de l’équipement d’étable usagé, 12 kilos de quota supplément­aires et des animaux. Six généreux producteur­s lui ont également donné des vaches pour porter son total de bêtes à 30. C’était parti!

Un départ difficile

« J’ai connu l’enfer, lance aujourd’hui sans détour Maude Gouin Huot. Dans la vieille étable contenant de l’équipement usagé, il y avait toujours un nouveau problème, quelque chose qui brisait : le filage, les moteurs, etc. Et si tu n’es pas capable de faire toi-même tes réparation­s en agricultur­e, tu te fais avoir par bien du monde », explique-t-elle. À cela s’est ajoutée une autre problémati­que : le foin. N’ayant pas de terre, elle devait l’acheter. « J’ai eu une entente de trois ans avec un producteur qui me vendait du bon foin. C’est là que mes vaches ont produit le plus de lait. Après, j’ai dû me débrouille­r pour en acheter ici et là. Mais beaucoup d’agriculteu­rs sont à l’argent. Ils m’ont refilé leur mauvais stock et ils le savaient très bien. »

Le foin de piètre qualité a diminué la performanc­e de son troupeau qui, combinée à la baisse du prix du lait, a amputé sérieuseme­nt sa rentabilit­é. Contrairem­ent au plan initial, son entreprise ne dégageait pas assez de revenus pour lui permettre d’embaucher de la main-d’oeuvre, l’obligeant à travailler sans relâche. « Je suis native de Québec. Quand mon père venait me visiter et me voyait dans toute cette misère, ça le faisait parfois pleurer », confie Mme Gouin Huot.

Son expérience en agricultur­e se termine mal, sans être négative dans l’ensemble. La principale intéressée assure en être sortie grandi. Elle change maintenant de vocation pour étudier en mécanique d’engins de chantier.

« Quand tu ne réussis jamais à prendre le dessus, tu ne vois plus ce que tu fais de bon ; tu vois uniquement ce que tu n’as pas fait. » – Maude Gouin Huot

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Les difficulté­s vécues par la ferme de Maude Gouin Huot l’obligent à mettre sa passion pour l’agricultur­e de côté et à changer de métier.

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