« Il y a vraiment de quoi qui ne fonctionne pas » – Vincent Frenette
La récente faillite de la Coopérative La Mauve laisse l’un de ses fondateurs perplexe face à la viabilité même de l’agriculture de proximité. « Avec La Mauve, chaque dollar dépensé par le consommateur allait dans la poche des producteurs et des travailleurs de Bellechasse plutôt qu’à Toronto ou aux États-Unis. Et ça améliorait l’offre alimentaire de la population locale. On a tout essayé pour trouver la solution magique pour que ça marche, mais on n’a pas réussi. La vérité, c’est qu’au niveau du soutien de l’achat local, il y a vraiment de quoi qui ne fonctionne pas au Québec », conclut Vincent Frenette, qui est également coordonnateur d’un organisme de développement social et d’autonomie alimentaire à Lévis.
Pas assez compétitifs
Membre du conseil d’administration du début à la fin de La Mauve, M. Frenette estime qu’avant de signer des traités de libre-échange et de subventionner l’exportation, les politiciens devraient plutôt subventionner l’autonomie alimentaire des populations locales. « À La Mauve, on s’en venait bons, on avait réussi à rationaliser les dépenses, mais nos frais fixes étaient quand même de 28 % comparativement à 14 % pour l’industrie. On n’était pas assez compétitifs. Soit qu’on augmentait nos prix et qu’on perdait notre marché, soit qu’on barguinait nos producteurs, ce qui était contre nos valeurs », indique M. Frenette. Il ajoute du même souffle que si La Mauve avait bénéficié d’une subvention de 40 000 $ par année, il ne serait pas question de faillite aujourd’hui.
La Mauve livrait hebdomadairement 450 paniers de produits maraîchers et carnés jusqu’à Québec. Ces aliments locaux étaient aussi offerts en boutique, dans l’ancien magasin général de Saint-Vallier, qui servait également de lieu de découpe et de transformation des produits carnés. La coopérative y a même aménagé un café pour attirer la clientèle. « Tu augmentes l’offre pour avoir plus de revenus, mais tu as besoin de plus de main-d’oeuvre et d’équipement, ce qui gruge tes profits. Et quand tu cesses de vendre des produits moins rentables, l’offre devient moins attrayante et l’achalandage de la boutique baisse : la vente directe [d’aliments locaux], surtout en région, c’est vraiment difficile », analyse-t-il.
Vincent Frenette souligne qu’au fil des années, plusieurs personnes sont venues visiter La Mauve afin de s’inspirer de ce concept. Il souhaite que la fin de la coopérative ouvre les yeux aux dirigeants afin que les autres petites fermes et initiatives de mise en marché local ne connaissent pas le même sort.