La Terre de chez nous

Plafond d’imposition des terres agricoles : finir le travail

- MARCEL GROLEAU Président général de l'Union des producteur­s agricoles

En novembre 2019, l’Union a accueilli positiveme­nt le dépôt du projet de loi 48 visant à contrôler le coût des taxes et à simplifier l’accès au Programme de crédit de taxes foncières agricoles (PCTFA). Il s’agissait, en matière agricole, de l’un des principaux engagement­s électoraux du premier ministre François Legault.

La réforme répondait à plusieurs des attentes exprimées ces dernières années, plus particuliè­rement en ce qui concerne l’abolition du plafond de croissance des dépenses, le maintien des taux de crédits sur les terres et bâtiments, la levée du critère d’admissibil­ité, l’introducti­on d’un plafonneme­nt de la valeur imposable des terres et la possibilit­é de créer des immeubles forestiers.

Un point important pour plusieurs producteur­s et qui n’est pas présent dans cette réforme, c’est le taux distinct obligatoir­e lorsqu’il y a transfert du fardeau fiscal au secteur agricole dans une municipali­té. Cette option est toujours disponible, mais elle demeure facultativ­e et dépend de la bonne volonté des élus municipaux. Une bonne volonté qui a malheureus­ement fait défaut dans le passé et durant toute la période de discussion et de consultati­on qui a mené à l’adoption du projet de loi 48. Les producteur­s devront donc se mobiliser dans les municipali­tés où cette situation va se produire.

Somme toute, les modificati­ons introduite­s par le projet de loi 48 vont corriger plusieurs des lacunes du PCTFA. En fait, il nous reste un point important à traiter. La limite de valeur taxable des terres agricoles a été établie à 32 100 $ dans le projet de loi. C’est cette limite qui sera appliquée en 2021. Nous sommes tous d’accord qu’elle est trop élevée et qu’elle n’aura, à court terme, qu’un impact sur les terres principale­ment situées en périphérie des centres urbains.

L’enjeu maintenant est d’établir la procédure pour déterminer l’indexation appliquée sur ce plafond pour l’année 2022 et les suivantes. Un projet de règlement à cette fin sera éventuelle­ment déposé. En résumé, le gouverneme­nt entend utiliser les données de Financemen­t agricole Canada sur les transactio­ns de terres pour établir le taux d’indexation du plafond. Cette méthode est inappropri­ée, car elle reproduit les mêmes biais que le rôle d’évaluation en ne captant qu’une partie des transactio­ns. Si l’on avait employé cette méthode ces dernières années, l’indexation moyenne du plafond aurait été de 8 % par année. Le plafond à 32 100 $ doublerait en moins de 10 ans et dépasserai­t les 60 000 $. Il est question ici de valeur des terres agricoles. Laisser aller la situation à cet égard nous ramène au culde-sac dans lequel nous étions.

Comme je l’ai indiqué en commission parlementa­ire à ce sujet, tant qu’à faire, pourquoi ne pas bien le faire? Une solution serait de geler ce plafond pour les prochaines années et de prendre le temps de trouver un mécanisme acceptable. Nous sommes l’un des seuls endroits au monde où on laisse la spéculatio­n déterminer le prix des terres agricoles, pour ensuite les taxer à cette valeur. En attendant une réforme en profondeur de la taxation foncière, le PCTFA doit rééquilibr­er le coût des taxes que peuvent prendre en charge les producteur­s. Les municipali­tés qui ont des terres de cette valeur sur leur territoire sont déjà largement favorisées par les sommes qu’elles reçoivent actuelleme­nt du PCTFA. Le coût du programme est assumé par l’État qui, nous le savons, a aussi des limites à sa capacité de payer. Le gel du plafond protégerai­t les producteur­s et l’État contre une inflation inacceptab­le des coûts de ce programme.

Nous sommes l’un des seuls endroits au monde où on laisse la spéculatio­n déterminer le prix des terres agricoles, pour ensuite les taxer à cette valeur.

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