La Terre de chez nous

Quand être une maman agricultri­ce passe avant la maladie

- AUDREY-ANNE COSSETTE Saint-Eugène-d’Argentenay, Saguenay–Lac-Saint-Jean

Vous le savez, être malade quand nous sommes producteur­s ou bien maman, ça signifie qu’on doit mettre les bouchées doubles. Je m’appelle AudreyAnne Cossette, je suis conjointe d’un producteur laitier et je porte plusieurs casquettes. Je suis maman, ouvrière agricole, inséminatr­ice bovine, cuisinière, femme de ménage et parfois même docteure.

En avril 2020, j’ai mis au monde mon tout premier garçon, en plein début de pandémie et au début de la grosse saison en agricultur­e. Pendant les premiers mois, j’ai dû prendre soin de nous et me relever de mon accoucheme­nt seule, car les travaux aux champs devaient se faire. Ma famille étant hors région, ils n’ont pas pu venir m’aider. J’ai été tout de même chanceuse de ne pas avoir à aller à la ferme pour donner un coup de main. C’est loin d’être la réalité de toutes les mamans agricultri­ces.

En décembre 2020, alors que la grosse saison était terminée et que nous pouvions enfin profiter de notre petit trésor, la vie en a décidé autrement. Ma belle-famille a attrapé le coronaviru­s et, en peu de temps, nous étions tous malades, sauf mon fils, heureuseme­nt. Mon beau-père et ma belle-soeur sont entrés à l’hôpital d’urgence. Mon beaupère a été intubé et mis dans un coma artificiel. Nous ne savions pas si nous le reverrions un jour. Ma belle-soeur est revenue une semaine plus tard, mais toujours malade. Je devais désinfecte­r la maison tous les jours, faire les repas, m’occuper de mon bébé et prendre soin de toute la famille. Mon conjoint était épuisé par la peur de perdre son père. Il n’avait plus d’énergie pour combattre le virus et il était incapable de se lever le matin. J’ai alors mis un de mes multiples chapeaux et, malgré mon manque d’énergie, je me levais le matin pour aider mon beau-frère avec les animaux. Je revenais pour le dîner, faisais le repas, m’occupais de mon garçon, désinfecta­is la maison et retournais à l’étable. J’ai fait ça durant quelques jours pour que mon conjoint puisse reprendre le dessus. Nous avons été malades près d’un mois entier à travailler avec le peu d’énergie qu’il nous restait. Nos prières ont tout de même été exaucées puisque mon beau-père est de retour parmi nous.

Mon histoire en est une parmi tant d’autres. Tous les producteur­s tombent un jour, que ce soit de maladie ou de blessures. Il faut alors prendre congé quelques jours pour se rétablir au plus vite. Imaginez une maman agricultri­ce qui tombe malade. Elle ne peut pas et ne veut pas arrêter, car c’est le noyau de son entourage. Sa journée ne se termine jamais quand elle sort de l’étable, car son deuxième quart de travail l’attend à la maison. Il y aura peut-être une place pour sa santé à l’agenda durant l’hiver si tout va bien et encore là...

Je veux alors vous passer ce message : profitez de chaque instant avec votre famille, même si votre entreprise vous en demande beaucoup. On ne sait jamais quand sera la dernière fois que vous les verrez.

(...) profitez de chaque instant avec votre famille, même si votre entreprise vous en demande beaucoup. (...)

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Audrey-Anne Cossette pose ici avec son bébé et son conjoint.
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