L’environ’mental des agriculteurs
Attention! Le sujet qui suit peut heurter certaines cordes sensibles; je préfère vous en avertir. Pour cette chronique, j’ai décidé de sortir de ma zone de confort et d’aborder avec vous cette crainte trop souvent entendue quant à la redoutée visite du ministère de l’Agriculture ou de l’Environnement dans vos entreprises. Que ce soit une visite surprise ou en raison d’une plainte, on en parle, mais toujours avec un noeud dans la gorge. Comprenez-moi bien, le but ici n’est pas de dépeindre négativement l’existence de ces instances, mais plutôt de réfléchir avec vous au sentiment de méfiance et de peur qui existe envers elles. Comme s’il y avait deux clans : elles et vous. J’aimerais donc profiter de la tribune qui m’est accordée pour inviter les producteurs, mais aussi les gens des ministères, à repenser leurs échanges.
J’entends régulièrement parler de la lourdeur des normes et règlements liés à l’agriculture, du fait qu’il faut toujours en faire plus pour satisfaire aux nouvelles exigences, le tout sans garantie que cela puisse augmenter la rentabilité de la production. Souvent, on m’a mentionné la perception de la notion de « deux poids, deux mesures » lorsqu’on exige certaines mesures pour les producteurs alors qu’on laisse passer des déversements d’égouts dans les cours d’eau. Cela a un impact sur la santé mentale. Devoir répondre aux attentes des ministères, ce n’est pas toujours simple.
Jacynthe me racontait qu’elle a récemment reçu deux inspectrices de l’environnement chez elle. « Tu vois le char débarquer dans la cour pis tu sais déjà que tu es coupable de quelque chose. De quoi? Tu ne le sais pas encore, mais tu sais qu’elles vont trouver. C’est fâchant parce que moi, je n’avais pas le temps d’être avec elles; j’avais de l’ouvrage aux champs. »
Bien sûr, nous ne connaissons pas la perception de ces inspectrices qui se présentent dans les fermes. Toutefois, à mon humble avis, les producteurs et les ministères sont interdépendants. Les producteurs sont les gardiens de nos territoires et les lois servent à éviter les débordements. Personne ne peut être contre une saine gestion de l’environnement. Cependant, il m’apparaît anormal que la dynamique actuelle repose sur la méfiance. J’ai envie d’inviter les gens à se niveler mutuellement vers le haut, à avoir une dynamique de partenariat pour upgrader les pratiques agricoles.
Une saine collaboration est possible
Comme je suis une éternelle optimiste, je pense que rétablir une saine collaboration est possible, mais pas sans l’apport de tout un chacun. Voici donc quelques petits rappels bien simples à utiliser tant de la part des inspecteurs que des producteurs. Il va sans dire que de part et d’autre, l’agressivité n’est pas de mise. Tout repose sur des valeurs telles que la compréhension mutuelle et le respect. J’aimerais inviter les producteurs à faire un pas de côté et à ne pas percevoir l’inspecteur comme un ennemi. Je sais que c’est difficile, mais oubliez un peu vos appréhensions ou mieux, partagez-les.
Ensuite, j’aimerais inviter les fonctionnaires à mieux s’outiller pour comprendre la réalité des agriculteurs. Ça passe notamment par le fait de se rendre compte du momentum de la visite. Idéalement, en période occupée, les visites devraient être planifiées à l’avance. S’il y a un gros problème, il n’aura probablement pas disparu la semaine suivante. Finalement, soyez conscients de la source de stress que votre visite engendre et faites appliquer vos demandes avec une certaine souplesse en tenant compte du temps dans l’année.
Ensemble, on peut faire mieux. On peut aller plus loin et innover dans une dynamique d’entraide réelle. Évidemment, les efforts de part et d’autre sont nécessaires à la réussite. J’y crois. Et vous?
« Tu vois le char débarquer dans la cour pis tu sais déjà que tu es coupable de quelque chose. De quoi? Tu ne le sais pas encore, mais tu sais qu’elles vont trouver. »