Des producteurs sur le qui-vive
Le prix élevé du porc sur le marché aide les éleveurs à absorber les pertes engendrées par le nombre de porcs en attente dans les élevages et le prix élevé du grain. Mais avec la peste porcine africaine (PPA) aux portes des États-Unis, certains craignent une éclosion en territoire américain qui provoquerait une chute des prix pour les producteurs québécois.
C’est la facette la plus inquiétante par rapport à la découverte récente de foyers d’éclosions de PPA en République dominicaine, estime Mathieu Bisson, producteur de porcs à Sainte-Marie, dans ChaudièreAppalaches. « Car la PPA, ce n’est pas une maladie comme la SRRP [syndrome reproducteur et respiratoire porcin], qui se transmet par aérosol. Et je crois que nos mesures actuelles de biosécurité sont efficaces. Par contre, les dommages qu’on pourrait subir sur le plan économique sont inquiétants si une éclosion de PPA survient aux États-Unis et que les prix chutent là-bas, puisque nos prix sont fixés en fonction des leurs. Ça pourrait faire de gros dommages, parce qu’on n’a pas pu faire de réserves depuis un an », précise M. Bisson.
Ralentissement de production
La grève à l’usine d’Olymel de ValléeJonction, déclenchée avant même que la situation des porcs en attente générée par la pandémie de COVID-19 soit complètement résorbée, n’a pas permis aux éleveurs de reprendre leur souffle jusqu’à maintenant. « Actuellement, on arrive à s’en tirer sans abattre de porcs, mais pour ça, j’ai dû sauter une entrée de pouponnière. Ça nous aide à avoir la place pour garder les porcs plus longtemps, mais en revanche, je perds quatre semaines de production et les pertes financières qui en découlent. La chaleur nous aide un peu aussi, parce que les porcs engraissent moins vite », ajoute celui qui livre normalement ses animaux à l’abattoir de Vallée-Jonction.
Plus de maladies
La surcharge de porcs dans les bâtiments entraîne par ailleurs une gestion plus difficile des mesures sanitaires. « On traîne encore des maladies qu’on avait depuis le début de la COVID-19, parce qu’on n’a jamais été capables de vider complètement nos bâtiments pour tout nettoyer », indique M. Bisson.
Une situation observable dans la majorité des élevages en ce moment, reconnaît Frédéric Labelle, responsable des communications pour les Éleveurs de porcs du Québec. « On voit effectivement une certaine hausse des cas de SRRP ou de diarrhée épidémique porcine (DEP) un peu partout en raison du nombre de porcs en attente », confirme-t-il sans toutefois pouvoir chiffrer les pertes liées à ces maladies, très variables d’un site à l’autre.
Pour le producteur Mathieu Bisson, ces maladies ont causé des pertes de 7 % par lot, alors qu’en temps normal, elles avoisinent les 3 %. « Ce sont toutes ces petites choses qui s’ajoutent l’une à l’autre et qui font que s’il y avait une chute du prix du porc québécois sur le marché, ça ferait mal. Je me sens un peu comme la gymnaste Ellie Black en équilibre sur la poutre aux Olympiques de Tokyo », résume le producteur.