La Terre de chez nous

Trois ans après la légalisati­on

- MARTINE VEILLETTE mveillette@ laterre.ca

Un peu moins de trois ans après la légalisati­on du cannabis au pays, la production reste un défi pour ceux qui s’y lancent. La production étant encore jeune, certains obstacles subsistent.

Ayant reçu sa licence de production en 2018, Stéphane Bertrand, des Serres Vert Cannabis, à Mirabel dans les Laurentide­s, tente toujours de trouver le meilleur cultivar pour les conditions de sa serre. « Les plants ne sont pas conçus pour être cultivés en serre. Les plantes ne sont pas adaptées à la chaleur et la luminosité », indique-t-il. Le producteur de cannabis qualifie son produit actuel de B+ et souhaite en faire du A+, puis développer une saveur particuliè­re à Mirabel. « C’est complexe et pas si facile d’augmenter notre qualité », avance le producteur. Il souligne toutefois que cette réalité existait aussi pour les tomates au début de sa carrière de producteur, 30 ans avant de se lancer dans la culture de cannabis avec Canopy Growth. L’agriculteu­r ne regrette d’ailleurs pas son choix d’avoir délaissé la culture de tomates, que sa nièce a reprise.

Bien qu’il emploie 230 personnes, Stéphane Bertrand n’arrive pas à produire 60 000 kg de cannabis annuelleme­nt comme il le voudrait. Pour y arriver, il estime que davantage de machinerie automatisé­e sera nécessaire.

De son côté, Joël Lalancette, directeur des opérations à l’entreprise 5 points cannabis, située à Pierrevill­e dans le Centre-du-Québec, ne recommande pas à n’importe qui de se lancer dans ce type de production. « Si tu ne connais rien à l’agricultur­e, c’est un marché qui est dur. Certains voient juste les profits, mais ne voient pas l’ouvrage. C’est 24 heures, 7 jours. Moi, ça fait 20 ans que je suis en agricultur­e, alors je sais où je m’en vais », souligne-t-il. Selon lui, les nombreuses barrières permettent toutefois de se démarquer et d’éloigner les moins bons joueurs. Son entreprise vient d’obtenir sa licence pour transforme­r et vendre ses produits après avoir obtenu une licence de production en novembre 2019.

Restrictio­ns québécoise­s

Les restrictio­ns émises par le gouverneme­nt du Québec limitent la production de cannabis dans la province, estime Michel Timperio, président de l’Associatio­n québécoise de l’industrie du cannabis (AQIC). « On a beaucoup de défis versus les autres provinces pour la mise en marché. C’est plus réglementé et on n’est pas supporté d’aucune façon », affirme le président de Neptune Wellness Solutions, à Laval, une entreprise de transforma­tion et d’extraction. Il ajoute que le Québec est loin des autres provinces en termes de nombre de producteur­s versus la population. En date du 12 août, 85 licences de production avaient été délivrées au Québec sur les 551 à travers le Canada.

Marché noir

En juin, la Société québécoise du cannabis (SQDC) affirmait avoir ravi 53 % de la clientèle au marché illicite, appuyant cette donnée « sur une récente estimation de la demande annuelle québécoise de cannabis ». Ces chiffres ne convainque­nt toutefois pas Michel Timperio, qui estime que le marché noir est encore très présent. Il rappelle que l’âge pour consommer du cannabis au Québec est de 21 ans. Il croit donc que les jeunes s’y approvisio­nnent encore. À l’aube des trois ans de la légalisati­on, il souhaite rencontrer le gouverneme­nt pour le sensibilis­er à la réalité des producteur­s.

Pour Joël Lalancette, c’est la qualité de leur produit qui aura raison de ce marché illicite. « Le marché est bon quand tu as un produit de qualité. Le client devient de plus en plus difficile. On voit qu’il est de plus en plus ouvert au goût, à l’odeur et à la qualité du produit », avance-t-il.

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L’entreprise 5 points cannabis a récemment obtenu sa licence pour transforme­r et vendre sa production.
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Stéphane Bertrand

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