La Terre de chez nous

Des changement­s problémati­ques à la gouvernanc­e de la FADQ

- MARTIN CARON Président général de l'Union des producteur­s agricoles

L’Union a participé récemment aux consultati­ons parlementa­ires sur le projet de loi no 4, qui modifie la gouvernanc­e des sociétés d’État. Ce projet de loi prévoit des changement­s importants à la compositio­n des conseils d’administra­tion (CA), incluant celui de La Financière agricole du Québec (FADQ).

À l’heure actuelle, le CA de la FADQ est constitué de 15 membres, dont 5 nommés par l’Union. Cette représenta­tion serait réduite à 3 membres seulement (sur 15), ce qui va clairement à l’encontre du pacte d’origine entre le gouverneme­nt et le monde agricole.

Au démarrage des activités en 2001, 5 des 11 membres du CA, incluant la présidence, étaient désignés par l’Union. À cette occasion, le premier ministre du Québec, Bernard Landry, déclarait ce qui suit : « Ce qu’on fait aujourd’hui, c’est qu’on ajoute un fleuron au modèle québécois. […] Et on le fait, en même temps, en déchargean­t l’État de certaines tâches dont il s’occupait directemen­t, pour les confier à un partenaria­t avec le secteur associatif. […] Ces activités [seront menées] d’une façon plus souple, avec une mentalité d’affaires, avec un dynamisme et des possibilit­és d’innovation qu’on ne retrouve que difficilem­ent dans le secteur purement étatique ». Ces paroles confirmaie­nt la création d’une collaborat­ion sans précédent, unique au pays.

Les changement­s proposés vont toutefois dans le sens inverse. Au gré des diverses réformes de la gouvernanc­e, l’Union ne s’est jamais formelleme­nt opposée à l’effritemen­t graduel de sa représenta­tion, même si on s’éloignait chaque fois du partenaria­t novateur à l’origine de l’institutio­n. Mais la réduction prévue va trop loin.

Les agriculteu­rs du Québec ont pourtant raison de s’attendre à une implicatio­n plus importante que dans d’autres sociétés d’État. Au total, c’est près de 40 % du financemen­t des fermes québécoise­s qui est soutenu par la FADQ. Environ 20 000 des 28 000 entreprise­s agricoles au Québec font affaire avec l’institutio­n. Cela témoigne d’une relation de confiance qui est à la base de la forte adhésion des producteur­s.

La FADQ se distingue aussi par la qualité de sa gestion. Elle a d’ailleurs reçu en 2020 le prestigieu­x Prix performanc­e Québec, remis chaque année par le premier ministre du Québec aux entreprise­s privées et aux organismes publics qui ont appliqué les meilleures pratiques de gestion. La FADQ jouit également d’un taux de satisfacti­on exceptionn­ellement élevé de sa clientèle.

Mais la FADQ, c’est beaucoup plus que des programmes : c’est une gestion des risques par et pour les producteur­s agricoles, qui détiennent dans les différents fonds plus d’un demi-milliard de dollars de leur propre argent. C’est un niveau d’engagement exceptionn­el. Et cet engagement repose en grande partie sur une forte présence de l’Union au CA, qui permet notamment une contributi­on importante au plan stratégiqu­e de l’institutio­n. Cette contributi­on est essentiell­e pour bien répondre aux besoins de la production agricole et maintenir la confiance des adhérents aux divers programmes.

Le principal objectif du projet de loi est d’assurer un cadre plus transparen­t et efficace dans la gouvernanc­e des sociétés d’État. Les changement­s proposés nuiraient à la confiance recherchée. Le partenaria­t entre l’État et les agriculteu­rs est une richesse pour le Québec. Il a fait ses preuves, d’autant plus que le processus de nomination des membres de l’Union assure déjà la parité hommes-femmes et la présence des jeunes, comme le souhaite le gouverneme­nt. Cet aspect du projet de loi doit être amendé.

L’Union ne s’est jamais formelleme­nt opposée à l’effritemen­t graduel de sa représenta­tion, mais la réduction prévue va trop loin.

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