La Terre de chez nous

Un virage vers les paniers d’hiver

- LYLOU NICASTRO Collaborat­ion spéciale

La Ferme du coq à l’âne de Bury, en Estrie, se concentre sur la culture hivernale pour une deuxième année.

L’idée est venue d’un besoin de ralentir le rythme intense venant avec les récoltes estivales. Finis la transplant­ation des semis, le désherbage, les récoltes et la mise en marché, tous faits en même temps. Les paniers d’hiver permettent aux deux propriétai­res, Marilyn Ouellet et Frédéric Verville, de mieux répartir les tâches à travers l’année.

Le couple possède trois serres. Dans la première, non chauffée, ils cultivent les épinards, plus tolérants au gel. Les deux autres, dans lesquelles ils commencent les implantati­ons aux mois d’août et de septembre, sont chauffées à 2 °C. « L’objectif est d’arriver à ce que pratiqueme­nt toutes les cultures soient prêtes à être récoltées en décembre, au moment où elles arrêtent de pousser », explique Frédéric Verville. « Pendant deux ou trois mois, les serres agissent comme de grosses chambres froides, où les légumes, racines dans le sol, se conservent bien. » Ils y font pousser une variété de produits : laitue, oignons verts, coriandre, bette à carde, céleris, fines herbes et bien d’autres verdures.

« Ce n’est pas tellement compliqué, en fait », affirme le producteur. Pour éviter le gel, les agriculteu­rs ont installé des fils chauffants dans certains tuyaux et ont isolé certaines parties des serres qui perdaient plus de chaleur. Ils ont aussi placé des ventilateu­rs pour diminuer le taux d’humidité et, ainsi, réduire les risques de maladies.

La présence de pucerons constitue leur principal souci. « Pendant l’été, on est capables d’introduire des insectes bénéfiques qui vont s’attaquer aux pucerons et les contrôler, sans avoir à appliquer de produit », explique-t-il. L’hiver, ces insectes bénéfiques dorment, mais pas les pucerons. L’utilisatio­n de bio-insecticid­es devient parfois nécessaire.

Onze fermes en offrent

L’intérêt envers les aliments locaux et biologique­s étant en plein essor, les abonnement­s aux paniers de légumes provenant de fermes maraîchère­s québécoise­s augmentent chaque année, au point où la demande dépasse même l’offre. C’est ce que remarque le Réseau des fermiers et des fermières de famille. « L’année 2020 fut exceptionn­elle en termes de nouveaux abonnement­s, et cela s’est poursuivi en 2021. Ceci confirme que notre modèle d’agricultur­e soutenue par les citoyens intéresse réellement les gens et qu’ils sont prêts à s’y investir », note Laura Bédard Hillman, responsabl­e des communicat­ions pour la Coopérativ­e pour l’agricultur­e de proximité écologique (CAPÉ), l’organisati­on qui gère le réseau.

Toutefois, les paniers bio sont surtout un phénomène estival. Sur 141 fermes, seulement 11 offrent des paniers d’automne et 11, des paniers d’hiver.

Le goût du froid

Les copropriét­aires de la Ferme du coq à l’âne de Bury constatent que le froid influence le goût de leurs aliments. « Quand les légumes sentent qu’il fait froid, ils produisent des sucres, parce que ça les protège du gel », explique M. Verville. Le céleri, par exemple, en ressort plus goûteux que s’il avait été cultivé en été. Les revenus sont à peu près les mêmes qu’avec les paniers d’été, mais la comparaiso­n est encore hâtive puisque le virage est récent. Il y a tout de même deux avantages notables : le coût de la main-d’oeuvre représente, pour le moment, 25 % de ce qu’il était en 2020 et les pertes sont minimes comparativ­ement à la saison estivale. Les légumes d’hiver se conservent plus longtemps et ont un rendement plus uniforme.

Cet article a été produit en associatio­n avec le cours Quête de sens journalist­ique, animé par Jean-François Gazaille à l’Université du Québec à Montréal.

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Marilyn Ouellet et Frédéric Verville misent désormais sur des paniers d’hiver.

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