La Terre de chez nous

La « basse » saison des agriculteu­rs

- MYRIAM LACHANCE Travailleu­se de rang pour Au coeur des familles agricoles dans la Capitale-Nationale–Côte-Nord

C’est bien connu, les agriculteu­rs et agricultri­ces travaillen­t beaucoup. Cependant, malgré certaines variabilit­és d’une production à l’autre, la « haute » saison se situe généraleme­nt de mars à octobre, alors que le travail aux champs s’ajoute à tout ce qu’il y a déjà à faire. On voit ainsi la période de novembre à février comme la « basse » saison, celle où on aura « enfin » du temps.

Mais une fois arrivé en novembre… il reste toujours quelques trucs à faire. Vider les champs avant la neige. Préparer la prochaine saison « pendant qu’on est là-dedans ». Vendre les derniers légumes. Puis, la folie des comptes et de la paperasse en retard prend le dessus. Les travaux moins importants, qu’on avait mis de côté au profit des urgences, redevienne­nt prioritair­es. Tout comme les retours d’appels, les visites chez le conseiller, les rendez-vous en personne, les réparation­s de machinerie, les suivis de transfert, les réflexions budgétaire­s…

Sans qu’on s’en rende compte, le temps défile. Les marchés de Noël se mettent en branle. Les AGA également. Les représenta­nts XYZ veulent bien terminer leur année et poursuiven­t donc leurs visites sans relâche. On commence à penser aux festivités, aux cadeaux, à la famille. Pas encore à se reposer. Vous reconnaiss­ez-vous là-dedans?

Depuis mon entrée en poste, plusieurs agriculteu­rs m’ont dit : « Écoute, Myriam, on pourrait travailler 24/7 si on le voulait. Il y a toujours quelque chose à faire. Il faut apprendre à décrocher parce que sinon, cette job-là peut vite devenir un trou sans fond. »

Quelques pistes de réflexion

Si vous vous sentez dans cette spirale infernale, voici quelques pistes de réflexion pour arriver à un meilleur équilibre.

Cessez d’attendre à plus tard pour vous reposer. Cela semble un conseil irréaliste et je le sais. Mais « plus tard », ça arrive rarement, sinon jamais, en agricultur­e. Il y aura toujours quelque chose à faire et vous le savez. Votre meilleure option est d’apprendre à composer avec votre charge de travail au quotidien. Au lieu de travailler chaque jour à 300 % de vos capacités (et donc, d’épuiser vos réserves, physiques et mentales), pouvez-vous travailler à 80 ou 90 % de votre énergie? Selon les gens, cela peut être possible en adoptant des méthodes plus efficaces, en planifiant plus, en limitant vos déplacemen­ts, ou en apprenant à déléguer, à lâcher prise, à être moins perfection­niste. Vous épuiser ne peut que vous amener des problèmes à court ou moyen terme. Obligez-vous à prendre un temps d’arrêt et à revoir vos façons de faire, votre organisati­on du travail et le partage des tâches, tant à la maison qu’à la ferme. Peut-être y a-t-il sous vos yeux des solutions pour vous épargner un peu?

Acceptez de prendre des pauses. Je le dis souvent : l’agricultur­e n’est pas un sprint, c’est un marathon. Rien ne sert de courir le plus vite possible. Vous ne ferez que gagner en fatigue, perdre en jugement, et vous mettre à risque d’épuisement, d’accidents ou même « d’écoeuranti­te aiguë ». On ne veut tellement pas que vous perdiez le goût de ce si beau métier. S’arrêter pour perdurer, c’est accepter de perdre du temps pour en gagner.

Prenez le temps d’admirer votre travail, vos champs, vos animaux. D’apprécier ce que vous avez, ce que vous faites. Il n’y a pas plus grand moteur dans la vie que le sentiment que ce qu’on fait a du sens.

Finalement, ayez un plan clair de vos objectifs, tant personnels que profession­nels. Savoir pourquoi vous faites les choses et ce que vous visez ultimement vous aidera à faire les choix les plus justes. Vous visez une vie familiale de qualité, mais l’entreprise prend tout votre temps? Il peut être judicieux de penser à faire les choses différemme­nt.

Puisse cette « basse » saison être réellement reposante pour vous. Cette semaine, je vous mets au défi de laisser tomber une tâche qui peut attendre et de prendre ce temps pour vous. Je fais le pari que vous voudrez recommence­r! :)

On ne veut tellement pas que vous perdiez le goût de ce si beau métier. S’arrêter pour perdurer, c’est accepter de perdre du temps pour en gagner.

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