La Terre de chez nous

Quand les « bonnes femmes » s’en mêlent

- MARTINE FRASER Travailleu­se de rang pour Au coeur des familles agricoles en Mauricie

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Je préfère vous avertir tout de suite : j’aborde un sujet tabou, complexe et surtout délicat. Quand on combine la tête, le coeur et les émotions aux facteurs financiers, c’est un beau melting pot pour créer des problèmes. Vous me voyez sûrement venir... Je manque de doigts pour calculer le nombre de fois où vous m’avez évoqué le ou la partenaire problémati­que de vos enfants ou de vos associés. Sans joke, je manque même d’orteils! Si j’ai titré « bonnes femmes », c’est uniquement parce qu’une plus forte proportion des partenaire­s amoureux non impliqués dans une ferme est féminine, mais avant de me pitcher des roches, sachez que c’est applicable également aux « bonshommes ».

Pour bon nombre d’entre vous, la famille est dans le travail et le travail est dans la famille, ce qui fait en sorte que la liste des enjeux potentiels avec la « blonde de », le « chum de », la bru ou le gendre est grande. D’abord, quand le ou la partenaire est au courant des réticences de la belle-famille, allô, les beaux malaises! Ensuite, pour certains membres « rapportés », s’adapter à la vie agricole est un défi en soi. En effet, faire le tour du monde est peu compatible avec la charge de travail à la ferme. Adieu, le rêve des vacances spontanées de trois, quatre semaines. Tout se réserve ou s’annule à la dernière minute, dépendamme­nt de la météo, des animaux, des bris mécaniques ou de Dieu sait quel autre imprévu! Les relations familiales et amoureuses peuvent facilement devenir conflictue­lles.

La question financière

Pour d’autres, c’est la question financière qui vient compliquer la patente. Si on prend les positions autour du transfert, par exemple, un partenaire non impliqué à la ferme peut convoiter la valeur marchande de l’entreprise, ce qui vient compromett­re la succession et les chances de la relève de pouvoir s’établir. Tommy a vécu une situation similaire dans sa famille. « Ma mère tirait fort pour que mon père vende et encaisse le gros chèque... Ça paraissait qu’elle ne voulait pas que je reprenne la ferme, même si moi, c’était mon rêve d’être la 4e génération. Elle essayait de me faire comprendre, de manière plus ou moins subtile, qu’elle ne voulait pas de cette vie-là pour moi. Elle n’avait pas de parts et n’était pas impliquée dans la ferme, mais elle s’est permis de dicter son opinion. Au final, mon père a vendu. »

Dans le cas de Guillaume, c’est lorsqu’il a divorcé de sa partenaire des 22 dernières années que ça a commencé à déraper. « Tout à coup, la personne que j’avais aimée durant si longtemps et qui m’avait vu travailler si fort me demandait la moitié de mes parts dans la ferme. Je capotais! Ça obligeait mes frères à me racheter, alors que ce n’était pas du tout prévu. L’entreprise s’est donc retrouvée en grosse précarité financière et ça a foutu la chicane avec ma famille. Ils me tiennent responsabl­e de ne pas avoir fait les bons papiers quand c’était le temps pour nous protéger. » Au bout du compte, tout ça cause beaucoup de tirailleme­nts entre le couple, la famille élargie et le business, et ça « coince » tout le monde.

Si on a une grande leçon à retenir de tout cela, c’est l’importance de faire les bons papiers, de communique­r et de prévoir. On ne le dira jamais assez, mais c’est important de le faire quand ça va bien. Faire des économies de bouts de chandelle sur des actes notariés, c’est pelleter par en avant de potentiell­es situations conflictue­lles. Je vous l’accorde, gérer une ou un partenaire problémati­que, c’est compliqué, mais pas impossible. Parlez-en entre collègues, associés ou en famille. Tout se dit, mais tout est dans la manière de le dire. Un travailleu­r de rang pourra très certaineme­nt vous apporter une aide pour démêler les noeuds et faire en sorte que toutes les parties trouvent une juste satisfacti­on.

« Ma mère tirait fort pour que mon père vende et encaisse le gros chèque... Ça paraissait qu’elle ne voulait pas que je reprenne la ferme, même si moi, c’était mon rêve d’être la 4e génération. »

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