Une ferme qui a grandi avec les enfants
Le chemin d’Alexandre Anctil semblait tout tracé d’avance. Après ses études en agriculture végétale à l’Institut de technologie agroalimentaire (ITA) de La Pocatière, il devait prendre la relève de la production de rosiers rustiques en serre de ses parents. La vie et les éléments en ont toutefois décidé autrement.
SAINT-MATHIEU-DE-RIOUX – « La ferme a subi quelques difficultés majeures qui ont fragilisé sa santé financière », raconte Alexandre Anctil, alors qu’il rentre tout juste de ramasser l’eau d’érable d’une saison qui s’annonce décevante au Bas-SaintLaurent. « Il y a eu un incendie et, deux ans après, de grands vents ont arraché le toit de l’entrepôt à sciure qui est tombé sur les serres. Les rosiers ont beau être rustiques, passer de 15 °C à - 20°C en une journée, c’était trop. Mon père a dû vendre l’entreprise », évoque le producteur.
La vente de la ferme familiale n’a toutefois pas altéré le goût d’Alexandre pour l’agriculture et la ruralité. Après ses études à l’ITA de La Pocatière, il entre au service de l’Union des producteurs agricoles (UPA) en 1996, où il passe 16 ans à s’occuper des marchés publics et de la vie syndicale. L’envie de posséder sa propre ferme ne le quitte cependant pas. Avec sa conjointe, Mélanie Duquette, qu’il rencontre à l’ITA, le projet prend forme, en même temps que son travail à l’UPA.
C’est d’ailleurs de Mélanie, originaire de l’Abitibi, que la ferme tient son nom : l’Abitibienne. « On cherchait quelque chose de rentable, de viable, de vivable. La production ovine permettait un démarrage progressif », soutient Alexandre Anctil. Ce type de production se prêtait également bien aux ambitions familiales du couple. « Ma conjointe a rapidement décidé de rester à la maison, parce qu’on a commencé notre famille très, très rapidement », raconte avec un brin de fierté le père de quatre enfants, trois filles et un garçon nés en l’espace d’un peu moins de six ans.
Des valeurs et de la terre
« Dès le départ, la ferme, c’était un moyen d’atteindre ce qu’on voulait : vivre dans un milieu rural et y élever nos enfants sur la terre », explique le producteur. « C’est extraordinaire d’élever des enfants à la ferme. C’est le développement de l’autonomie, du sens des responsabilités », dit celui pour qui la famille occupe manifestement une place centrale. « Je suis convaincu qu’on n’a pas besoin de faire des voyages à Walt Disney avec nos enfants pour partager quelque chose. On peut transmettre des valeurs, une façon d’être, tout en ramassant de la roche », insiste le père de 46 ans dont les enfants ont grandi au même rythme que la ferme fondée en 2000.
« Nous sommes partis de zéro. Zéro terre, zéro bâtiment. Rien », se rappelle Alexandre Anctil. « On parle du déménagement d’un bâtiment d’une terre
« C’est extraordinaire d’élever des enfants à la ferme. C’est le développement de l’autonomie, du sens des responsabilités. » – Alexandre Anctil
voisine, d’une première année dans un bâtiment loué dans un rang voisin avec
cinquante brebis », raconte le producteur d’agneaux lourds et de brebis de remplacement, dont le nombre de femelles atteint 550 aujourd’hui.
Il lui a fallu faire le choix stratégique de la triple hybridation de ses brebis : Dorset, Romanov et bélier de boucherie. Un choix judicieux s’il faut en croire le producteur. « Ça doit faire quatre ou cinq ans que je suis en haut du 110 kilos de viande vendue par brebis. Cette année, on est à 114 et on a déjà atteint 128, alors que le modèle ASRA [assurance stabilisation des revenus agricoles] prévoit une cinquantaine de kilos par année, par brebis », raconte fièrement celui qui voit naître de 2 200 à 2 400 agneaux par année dans sa bergerie.
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