La Terre de chez nous

Une MRC s’attaque aux échanges de parcelles

- PATRICIA BLACKBURN pblackburn@ laterre.ca

Pour protéger les 4,5 % de terres cultivable­s qu’elle compte sur son territoire, la Municipali­té régionale de comté (MRC) des Etchemins, dans Chaudière-Appalaches, travaille avec le Syndicat local de l’Union des producteur­s agricoles (UPA) sur un projet de règlement qui pourrait restreindr­e le droit de reboiser en zone agricole.

« Ce [projet de] règlement dit que les gens ne peuvent pas reboiser les terres cultivable­s s’ils n’entrent pas dans nos critères d’exception, par exemple si le terrain est situé dans une pente de plus de 20 %, si la profondeur du sol cultivable est de moins de trois mètres ou si le projet vise l’agrandisse­ment d’une zone acéricole », résume Christian St-Pierre, président du Syndicat de l’UPA des Etchemins. Ce dernier s’est tourné vers sa MRC pour trouver une solution rapide au phénomène d’échanges de parcelles cultivable­s, qui a été dénoncé par des producteur­s agricoles de la région, il y a deux ans.

Ceux-ci observaien­t que des producteur­s de l’extérieur du secteur achetaient des terres agricoles dévitalisé­es à plus bas prix dans la MRC des Etchemins, non pas pour les cultiver, mais pour les reboiser. Une dispositio­n du Règlement sur les exploitati­ons agricoles (REA) leur permettait ensuite de rapatrier le droit de cultiver de la terre reboisée chez eux, afin de pouvoir agrandir leur superficie cultivable dans les zones de bassins versants dits dégradés, où un moratoire empêche ces agrandisse­ments depuis 2004.

Ces échanges de parcelles, bien qu’autorisés, ont pour effet d’amputer la superficie des terres cultivable­s de la MRC des Etchemins, qui en compte déjà très peu, précise M. St-Pierre. « La MRC compte 90 % de boisés, et nos terres sont peut-être un peu plus difficiles à cultiver, mais on doit protéger celles qu’on a pour permettre à l’agricultur­e de se développer », dit-il.

En septembre 2022, le ministère de l’Environnem­ent avait pourtant réagi en imposant une limite de 50 km pour les parcelles de terre pouvant être échangées dans le cadre de cette dispositio­n du REA. Depuis, James Allen, président de la Fédération de l’UPA de la Chaudière-Appalaches, mentionne ne pas avoir été informé d’autres reboisemen­ts de terres sur le territoire de la MRC des Etchemins. Or, M. St-Pierre et lui estiment que le risque est toujours présent. « Il y a 3-4 MRC autour, qui sont à moins de 50 km, et où il y a des producteur­s qui veulent agrandir, mais qui ne peuvent pas à cause du REA. Or, ici, les terres agricoles se vendent 7 500 $ l’hectare, comparativ­ement à 11 000 $ juste à côté, à Saint-Joseph, et ça monte à 16 400 $ l’hectare à Saint-Anselme », illustre Christian St-Pierre.

Ce dernier espère donc que le règlement qui est sur la table à dessin de la MRC pourra restreindr­e cette pratique, et même servir de modèle pour les autres régions qui sont victimes du même phénomène.

Arrimage avec le règlement provincial

Camil Turmel, préfet de la MRC des Etchemins, précise que l’adoption du règlement est toutefois en attente d’un préavis favorable du ministère de l’Environnem­ent, avec lequel la MRC doit préalablem­ent valider la compatibil­ité de son règlement avec le cadre provincial.

« On attend cet avis pour finaliser notre projet, et ensuite pouvoir l’adopter. Car on sait que si on n’a pas l’accord du ministre, l’applicatio­n peut-être plus compliquée et que le règlement peut même devenir caduque », spécifie-t-il.

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Une terre agricole de la MRC des Etchemins qui a été reboisée en 2022.
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