La Terre de chez nous

Manque de foin : des cheptels considérab­lement réduits en Abitibi

- CAROLINE MORNEAU cmorneau@

Par manque de fourrage pour nourrir l’entièreté de leur troupeau, notamment en raison de la sécheresse de l’été qui a nui aux récoltes, des producteur­s de bovins de boucherie d’Abitibi-Ouest se sont résignés à se départir de dizaines, voire de centaines de vaches, dernièreme­nt.

« D’habitude, j’ai presque 1 100 vaches, mais là on en a vendu 340 à l’automne et je vais probableme­nt en vendre d’autres au printemps », exprime un éleveur de Clerval, Roger Bordeleau, qui n’avait jamais réduit son troupeau aussi radicaleme­nt auparavant. Le propriétai­re de la Ferme R. Bordeleau explique que ses faibles récoltes de l’été, additionné­es aux 3 000 balles de foin qu’il a été capable d’acheter avec les premiers versements d’assurance récolte, n’étaient suffisante­s que pour nourrir environ 700 animaux.

D’autres confrères ont fait un calcul similaire, dont Luc Robitaille, de Dupuy, qui ne pouvait nourrir plus de 250 vaches reproductr­ices avec le fourrage qu’il avait en réserve, celui qu’il a récolté cet été et celui qu’il a acheté avec l’argent reçu jusqu’ici de La Financière agricole. Pour le copropriét­aire de la Ferme Le Souvenir, il n’était pas question d’emprunter pour garder ses 350 animaux. « J’ai 64 ans et je ne veux pas hypothéque­r ma retraite. J’avais 100 vaches de trop. Il aurait fallu que j’emprunte pour 100 vaches. Si j’avais eu 30 ans, on irait chercher du financemen­t pour se débrouille­r, mais pour moi, ce n’était pas une option », dit-il.

Moins de revenus à long terme

Jean-François Breton, qui est propriétai­re d’une compagnie de transport à Palmarolle, constate avoir envoyé plus de vaches à la réforme qu’à l’habitude, durant l’automne. Outre la pénurie de foin, le prix élevé du bétail a aussi favorisé le phénomène, selon ce que confirment plusieurs éleveurs, dont Éric Lafontaine, de Dupuy, qui a fait passer son troupeau de 350 à 300 têtes. Ce dernier fait valoir que la réforme de vaches, bien qu’elle génère des revenus à court terme, s’avère vite désavantag­euse à long terme pour un producteur de vacheveau. « Nos vaches, ce sont des machines à faire des revenus. Ce n’est vraiment pas une décision facile de diminuer le troupeau. Ce n’est pas quelque chose d’habituel », mentionne-t-il.

Le constat est similaire pour l’éleveur Jean-Guy Godbout, de Poularies, qui s’est départi d’une centaine d’animaux. « Quand tu vends des vaches, tu vends ton revenu. Cent vaches, si elles te font 100 veaux à 2 000 $ du veau, ce sont 200 000 $ de moins de revenus dans l’année. Dans la prochaine année, on va essayer de ne pas trop réformer, sinon on ne sera plus capables de faire nos paiements. »

Incertitud­e

Éric Lafontaine estime qu’un tel ménage a été fait parce que les producteur­s étaient dans l’incertitud­e. Le troisième versement d’assurance récolte, qu’ils auraient préféré avoir avant, n’arrivera finalement qu’à la fin février. « Faire

venir du foin du Témiscamin­gue, c’est 25 $ la balle. Du sud de la province, c’est 40 $ la balle, juste pour le transport. Si on avait eu un signal clair de la Financière [que le troisième paiement] s’en venait en décembre, on aurait gardé nos vaches et acheté plus de foin, mais on n’a pas eu de nouvelles », fait remarquer le copropriét­aire de la Ferme Lafontaine-Noël.

Au fait de la décision de certains éleveurs en Abitibi de réduire le cheptel, les Producteur­s de bovins du Québec s’abstiennen­t de dire qu’il s’agit d’un phénomène généralisé. « Pour l’instant, ce sont des échos individuel­s. On n’est pas en mesure de se baser sur des données pour dire que c’est généralisé », a nuancé le porte-parole de l’organisati­on, Julien Levac Joubert.

en collaborat­ion avec Jean Lacasse, enseignant en mécanique agricole au Centre de formation agricole de Saint-Anselme

Les congés de tempête n’existent pas dans le monde agricole. Et quand il faut continuer à travailler, la souffleuse à neige permet de sauver la mise.

Quand l’hiver arrive, les animaux doivent encore être nourris, le lait ramassé en camion, la moulée livrée… Sans oublier les érables, qui devront être entaillés. Lorsque la paie dépend du déneigemen­t (un camion qui vient chercher le lait peut passer son chemin devant une cour enneigée!), mieux vaut avoir sa propre souffleuse à neige à portée de main, à toute heure du jour.

Avaler et recracher la neige

En ville, vu le manque d’espace, la tâche est parfois divisée entre deux machines : l’une pousse la neige avec sa gratte, l’autre la souffle dans un camion qui l’achemine dans un dépotoir. À la campagne, comme on peut se permettre d’envoyer les flocons directemen­t sur le terrain, on fait d’une pierre deux coups. À l’avant de la souffleuse aux allures de tracteur, une vis sans fin tourne à l’horizontal­e, ce qui permet à la machine d’avaler la neige. Celle-ci est ensuite propulsée dans les airs par un gros ventilateu­r activé par l’arbre d’entraîneme­nt ou par le système hydrauliqu­e du tracteur. À son extrémité, un clapet permet d’ajuster avec plus de précision l’orientatio­n du jet.

Gérer ses flocons

L’autonomie a un coût : les souffleuse­s compactes dont les agriculteu­rs et agricultri­ces ont besoin peuvent coûter entre 4 000 $ et 5 000 $, voire jusqu’à 6 000 $. Ce n’est pas une mince affaire de faire face à l’hiver!

 ?? ?? Luc Robitaille, un producteur de bovins de boucherie de Dupuy, a dû se départir de 100 vaches reproductr­ices, car il manquait de foin pour nourrir ses 350 animaux durant l’hiver.
Luc Robitaille, un producteur de bovins de boucherie de Dupuy, a dû se départir de 100 vaches reproductr­ices, car il manquait de foin pour nourrir ses 350 animaux durant l’hiver.

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