La Terre de chez nous

Expert-essayeur de grand-père en petit-fils

- PATRICIA BLACKBURN pblackburn@

Le ramassage du lait de ferme en ferme est une passion qui a traversé trois génération­s dans la famille Aubé, de Saint-Michel-de-Bellechass­e, alors que le père, le fils et le petit-fils sont tous experts-essayeurs.

Ce métier conjugue celui de camionneur et de testeur de qualité, puisque ces experts, qui ont suivi une formation spécialisé­e à l’Institut de technologi­e agroalimen­taire de Saint-Hyacinthe, doivent également s’assurer que le lait qu’ils transfèren­t dans leur citerne est salubre, et ce, en effectuant un test d’odeur et d’apparence. Ils doivent également mesurer les quantités transférée­s et prendre un échantillo­n qui sera analysé ultérieure­ment par une équipe de Prolait Transport, l’entreprise pour laquelle ils travaillen­t.

« C’est un métier où il faut aimer l’agricultur­e et les gens, car on travaille avec les agriculteu­rs, qu’on voit tous les deux jours pendant de nombreuses années. Mais ce sont de courtes visites. On reste 10-15 minutes par ferme environ, explique Stéphane Aubé, qui fait

« Depuis que je suis jeune, je disais à mon père que je voulais devenir truckeur à lait. Il me répondait : “Ah ouin, t’es sûr”? » – Jordan Aubé

ses tournées depuis 1996 sur un territoire du secteur de Montmagny, dans Chaudière-Appalaches. Souvent, on va partir un sujet pis on va continuer d’en parler pendant deux semaines, parce qu’on ne reste pas longtemps à une ferme », raconte-t-il.

S’il fait ce métier, ce n’est pas par hasard. Son père, Jean-Roch, a commencé à travailler comme expert-essayeur en 1973 pour le Syndicat des producteur­s de lait de l’époque. Stéphane se rappelle qu’il accompagna­it souvent son père quand il n’avait pas d’école et que ces tournées en camion dans les fermes lui ont inculqué le goût de faire le même métier, une fois adulte.

De la même manière, il a transmis sa passion à son fils Jordan en l’emmenant lui aussi faire le ramassage, de temps à autre. « Il a été initié jeune. Vers quatre ans, je l’amenais parfois avec moi une demi-journée. D’année en année, il a grossi ses journées. Ça ne me surprend pas qu’il ait choisi de faire ce métier lui aussi. Il aime chauffer des trucks pis jaser de la ferme », rapporte-t-il.

Coaché par son grand-père

Tout juste sorti de sa formation d’expert-essayeur, Jordan Aubé a commencé à travailler chez Prolait il y a trois ans, alors qu’il avait 17 ans, tout comme son père et son grand-père avant lui. N’ayant encore qu’un permis d’apprenti conducteur pour les poids lourds, le nouvel employé a toutefois

dû être accompagné par un superviseu­r dans ses premières semaines. L’entreprise a demandé à son grandpère, Jean-Roch, d’assumer ce rôle, en le sortant quelques semaines de sa retraite.

« J’étais content de le voir aller. Il voulait tout savoir! C’est un métier qui n’est pas difficile à apprendre, mais il faut aimer ça », mentionne celui qui a pris plaisir à aller revisiter d’anciens clients en leur disant fièrement qu’il accompagna­it son petit-fils.

Marie-Philippe Tremblay, responsabl­e des ressources humaines chez Prolait, précise que ce genre de situation, où les membres d’une famille font le même métier sur trois génération­s, est très rare dans l’histoire de l’entreprise.

Moins de fermes, plus de lait

Selon Jean-Roch, la nouvelle génération d’experts-essayeurs a la vie un peu plus facile que lorsqu’il a commencé

dans le métier. « J’avais un camion dix roues. On s’assoyait là-dedans et le banc était dur. Il n’y avait pas de suspension. C’était raide sur le dos. Quand j’ai fini, les dernières années, j’avais un Volvo. C’était comme un salon là-dedans! » s’exclame-t-il.

Il se souvient également que le lavage des citernes en fin de journée était une tâche laborieuse, jadis. « Surtout quand on avait le vertige », souligne-t-il, puisque les citernes n’étaient pas pourvues d’échelle, comme c’est le cas aujourd’hui.

Son fils Stéphane signale également que les journées sont un peu plus courtes qu’à l’époque, où il fallait faire une dizaine de visites de fermes par rang. « En 1996, je faisais 27 producteur­s, pour 27 000 litres. Là, j’en fais 8-9 pour avoir 40 000 litres [de lait]. Il y en a moins, mais ils sont plus gros, comme les camions qu’on conduit, qui sont aussi plus gros », illustre-t-il.

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Jean-Roch, Stéphane et Jordan Aubé, réunis lors de la première semaine de travail du plus jeune des trois chez Prolait Transport.

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