DANS L’AIR DU TEMPS
On peut affirmer sans se tromper que le Palace existe depuis plus longtemps que la grande majorité des Granbyens. Normal quand on sait que cette institution culturelle a été baptisée en 1934. Parce que la salle de spectacle est à la fois riche de son passé et tournée vers l’avenir, l’occasion est belle aujourd’hui de faire d’une pierre deux coups, en jetant un oeil à la fois dans le rétroviseur et dans la boule de cristal... La salle de la rue Principale a, depuis toujours, suivi l’air du temps. Au début du XXe siècle, c’est à travers le cinéma que plusieurs Granbyens se divertissaient. Après les cinémas Starland, Royal et Bijou, une nouvelle salle voit le jour, vers 1910, sur le site actuel du Palace. Baptisé le Varieties, ce cinéma présente des matinées pour les femmes et les enfants, qui doivent respectivement débourser 0,10 $ et 0,05 $ pour assister à la projection d’un film « à grand déploiement », peut- on lire dans l’ouvrage L’histoire de
Granby. Le livre raconte même que les clients recevaient alors un coupon leur donnant droit au tirage d’une coutellerie à la fin de chaque représentation !
Le Varieties devient, en 1920, le cinéma Élite. Les nouveaux propriétaires, John Costis et P. E. Sheridan, rénovent l’endroit pour offrir 800 places assises. « C’est l’époque du cinéma muet. Un batteur et un pianiste sont dans la salle pour faire les effets sonores. On y projette des films romanesques, de science, de voyage et d’actualité » , explique Louis- Charles Cloutier Blain, de la Société d’histoire de la HauteYamaska, en se référant aux ouvrages écrits sur cette époque.
Sous l’impulsion du cinéma parlant, arrivé à Granby en 1929, l’Élite commence à diffuser des productions uniquement en anglais. Sur la fiche du Circuit historique et patrimonial de Granby consacré au Palace, on apprend que l’adoption de son
nom actuel date de 1934, au moment où la salle subit encore d’importantes rénovations intérieures.
« Les propriétaires mettent le paquet en installant de l’équipement sonore dernier cri et en embauchant le réputé décorateur Emmanuel Briffa » , relate M. Cloutier Blain, en évoquant les murs de marbre, les draperies de soie et les murales peintes à l’image des jardins italiens. « À cette époque, les salles de cinéma offraient une expérience totale aux clients dès leur entrée. » Tous les grands films américains y sont alors projetés.
INCENDIE ET RECONSTRUCTION
En 1946, un incendie causé par l’explosion d’une fournaise dévaste l’édifice qui abrite le Palace. Les dommages sont estimés à 125 000 $, mais le feu ne fait heureusement aucune victime.
L’année suivante, le propriétaire d’alors, Roméo Robert, fait reconstruire le Palace, qui devient une salle climatisée de près de 1500 sièges, utilisée à des fins principalement cinématographiques. L’édifice compte aussi un restaurant, des commerces et des bureaux aux étages.
L’arrivée de la télévision, en 1951, change la donne. Seul le cinéma Palace survit à cette vague, mais il cesse les projections de films en 1981 avec Le lagon bleu. « D’une certaine façon, l’incendie dramatique de 1946 a dynamisé le nouveau Palace à un moment où la télé est venue bouleverser l’industrie du divertissement » , note M. Cloutier Blain.
Le Palace comme salle de spectacles se développe davantage dans les années 1980. La Ville de Granby et les Loisirs de Granby louent d’ailleurs l’endroit avec option d’achat en 1985 pour en faire officiellement un lieu de divertissement.
La vétusté des équipements oblige toutefois les autorités municipales à y entreprendre de grands travaux de rénovation intérieurs et extérieurs, en 1992. Au- delà de certaines modifications, son allure générale est comparable à celle qu’on lui connaît encore à ce jour.
« C’est intéressant de voir que les trois grandes phases de rénovations ont permis au Palace de briller à diverses époques. Ces investissements ont eu des retombées positives pour pérenniser la salle, qui est devenue un véritable pôle culturel » , termine M. Cloutier Blain.
Et bientôt, les choses vont encore changer...