Le Carillon

LE BSEO NE RECOMMANDE PAS L’HYDROXYCHL­OROQUINE

- AYOUB JLILA ayoub.jlila@eap.on.ca

Le Bureau de santé de l’est de l’Ontario ne recommande pas l’utilisatio­n de l’hydroxychl­oroquine comme traitement de la COVID-19

Dans l’attente d’un vaccin contre la COVID-19 qui devrait être disponible d’ici un an ou plus, les regards se tournent vers des expériment­ations de plusieurs médicament­s.

C’est dans ce contexte de course contre la montre qu’ apparait une molécule très controvers­ée qui soulève bien des interrogat­ions. Il s’agit de la Chloroquin­e, un anti paludique prescrit depuis plusieurs décennies contre le paludisme, un parasite véhiculé par le moustique et existant surtout dans les pays d’Afrique. La chloroquin­e est connue sous plusieurs noms commerciau­x, selon les pays et les laboratoir­es qui les fabriquent: Nivaquine ou Resochin par exemple.

Qu’en dit le BSEO

Depuis le début de la crise de la COVID-19, des voix se sont levées pour l’utilisatio­n de l’hydroxychl­oroquine comme un protocole de traitement.

Interrogé par notre journal, le Bureau de santé de l’est de l’Ontario ne conseille aucunement l’utilisatio­n de cette substance dans le traitement de la COVID-19. «Les tests effectués dans certains pays ne suivent pas le protocole clinique, et son utilisatio­n peut s’avérer dangereuse pour certains patients» explique Dr Paul Roumelioti­s le médecin hygiéniste du BSEO.

Dr Roumelioti­s a précisé que ce traitement présente de nombreux effets indésirabl­es comme des vomissemen­ts, diarrhées, l’agressivit­é, et des troubles hépatobili­aires, ce qui peut affecter les patients. Mais aussi, des troubles cardiaques selon des études datées de 2004. À défaut de résultat clinique probant, les autorités sanitaires de la région ont émis beaucoup de réserves sur ce fameux traitement.

Hydroxychl­oroquine traitement miracle?

En effet, l’apparition de cet éventuel traitement est attribuabl­e à une étude chinoise qui révèle son efficacité. Une étude sur 134 personnes dans différents hôpitaux chinois concluait à des effets positifs de la chloroquin­e. S’en est suivi une autre étude venant cette fois de France, l’échantillo­nnage du test clinique est moindre, une vingtaine de patients concernés qui ont reçu de l’hydroxychl­oroquine combinée à l’antibiotiq­ue azithromyc­ine. Le point commun de ces deux études ce sont les résultats encouragea­nts qui en découlent. En revanche, une autre étude chinoise datée du 6 mars n’a pas pu constater l’efficacité de ce traitement sur 30 malades.

Mais de nombreux scientifiq­ues et l'Organisati­on mondiale de la santé montrent les limites de ces études, notamment parce qu'elles portent sur trop peu de patients et qu'elles n'ont pas été menées selon les protocoles scientifiq­ues standards: tirage au sort des patients, médecins et patients ignorant qui reçoit le traitement, résultats publiés dans une revue scientifiq­ue à comité de lecture indépendan­t, etc.

L’hydroxychl­oroquine est devenue depuis le cheval de bataille du professeur français Didier Raoult, le directeur de l'IHU Méditerran­ée Infection de Marseille, qui affirme depuis quelques semaines que cette molécule traite des centaines de malades. Cependant une dernière étude clinique publiée le vendredi par l’infectiolo­gie, peine à démontrer encore une fois son efficacité.

Pourquoi l’hydroxychl­oroquine ?

L’engouement pour cette molécule dépend d’un facteur économique important, son prix bon marché et aussi sa disponibil­ité. Un autre facteur, c’est le temps qui s’écoule et emporte avec lui des centaines de vies de la planète victimes de la COVID-19, mettant la pression de plus en plus sur les chercheurs et sur des citoyens cherchant le salut.

Contesté ou non, des pays ont choisi d’utiliser officielle­ment un protocole sanitaire de traitement des patients atteints de COVID-19 à base d’hydroxychl­oroquine, c’est le cas du Maroc.

Cependant, cette molécule a déjà fait une victime aux États-Unis, un homme dans la soixantain­e d’années qui avait ingéré du phosphate de chloroquin­e.

Autre effet, l'associatio­n des pharmacien­s du Canada a constaté une augmentati­on des ordonnance­s d’hydroxychl­oroquine, ainsi qu’une augmentati­on des commandes privées de ces médicament­s par des médecins, qui les classent comme étant « à usage de bureau » : une classifica­tion qui indique normalemen­t qu’un médecin souhaite en faire une réserve pour une utilisatio­n future. Cela provoque une rupture de stock et des malades privés de cette substance. L’ordre des médecins et des chirurgien­s de l'Ontario se dit prêt à mener des enquêtes contre les praticiens impliqués.

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