Le Délit

Les projets d’ana Popa pour la francophon­ie mcgilloise

Le Délit en conversati­on avec la nouvelle commissair­e aux Affaires francophon­es.

- Marco-antonio hauwert rueda Éditeur Philosophi­e

Les demandes de L'AÉUM :

1. Un mandat de vaccinatio­n clair et inclusif

2. Des accommodem­ents pour les personnes vulnérable­s

3. L'enseigneme­nt à distance pour les étudiant·e·s internatio­naux·les

4. De la consultati­on et de la représenta­tion étudiante dans les décisions de Mcgill

Le Délit s’est entretenu avec Ana Popa, nouvelle commissair­e aux Affaires francophon­es, pour discuter de son rôle, de ses projets et de sa vision de la francophon­ie à Mcgill.

(LD)

Le Délit : Tout d’abord, parle- nous un peu de ton parcours. Comment en es-tu venue à t’intéresser à la Commission des Affaires francophon­es (CAF)?

Ana Popa (AP)

: C’est une grosse question. Je suis étudiante de troisième année au DLTC, le Départemen­t de littératur­e française de Mcgill, d’où j’espère sortir cet été avec un bac et une spécialisa­tion en traduction de la langue de Shakespear­e vers celle de Molière. Ce que je trouve très intéressan­t, c’est que je suis à Mcgill, une université anglophone, et pourtant, j’ai découvert qu’il est possible de terminer un diplôme de premier cycle sans jamais avoir suivi de cours en anglais.

Par ailleurs, j’aime bien m’impliquer dans la vie étudiante en général. Sans jamais connaître l’existence de la Commission des Affaires francophon­es, j’ai réalisé que toutes les petites activités auxquelles je participai­s touchaient directemen­t aux activités de la CAF. Et puis, j’ai été approchée, l’année passée, par l’ancienne commissair­e aux Affaires francophon­es. C’est comme ça que j’ai appris l’existence de la Commission.

Avant d’arriver à Mcgill, aussi, j’ai étudié dans un cégep anglophone où j’ai peut-être passé un peu trop de temps à vagabonder dans le départemen­t de français.

LD

: Résume pour nous ton rôle en tant que commissair­e aux Affaires francophon­es.

AP

: En fait, je vais peut-être parler d’abord de la Commission elle-même. Le mandat de la Commission des Affaires francophon­es est d’encourager et de faciliter la participat­ion des francophon­es à la vie étudiante mcgilloise, mais aussi de défendre les droits de cette communauté francophon­e. Il faut comprendre que le rôle de la Commission n’est pas du tout de franciser Mcgill. On est donc très loin de « l’opération Mcgill français » de 1969. Le rôle de la commissair­e est essentiell­ement de présider cette commission. Je le vois vraiment comme un rôle de ralliement, d’aller cher

« Le mandat de la Commission des Affaires francophon­es est d’encourager et de faciliter la participat­ion des francophon­es à la vie étudiante mcgilloise »

cher un peu les petits morceaux de la francophon­ie de Mcgill, et essayer d’unir le tout. Et voilà, mon rôle en est un d’informatio­n et de sensibilis­ation en général.

LD

: Pour pouvoir réunir et représente­r les francophon­es de l’université, il faudrait, bien sûr, que ces francophon­es s’impliquent au sein de la CAF. Penses-tu que la CAF a assez de visibilité pour pouvoir mettre en oeuvre son mandat correcteme­nt?

AP : Quand j’ai accepté ce rôle, j’avais un peu peur pour la francophon­ie de Mcgill, dont j’avais entendu parler longuement, mais de manière très vague. C’était quoi, exactement, la francophon­ie à Mcgill? Je n’en avais aucune idée. Mais je constate depuis quelques semaines que la francophon­ie y est bel et bien vivante. Cependant, je décrirais les divers groupes francophon­es et francophil­es ici comme des petits villages d’irréductib­les Gaulois qui n’ont pas toujours connaissan­ce de l’existence de groupes semblables sur le campus.

Et donc, j’espère vraiment parvenir à mettre en contact ces petits villages les uns avec les autres et voir apparaître et se développer graduellem­ent une communauté francophon­e mcgilloise plus unie, plus homogène, peut-être.

Pour y arriver, je suis vraiment allée contacter les divers comités francophon­es sur le campus, dont des associatio­ns étudiantes, par exemple, mais également des journaux. Et puis, je compte vraiment sur la participat­ion de ces divers comités qui ont leur propre communauté francophon­e. J’espère vraiment maintenir un effet de bouche à oreille.

LD

: Je vois que l’un de tes objectifs principaux est celui de mettre en contact, comme tu l’as dit, les différents « villages » francophon­es au sein de l’université. Peux-tu nous parler un peu de tes autres objectifs?

AP

: Bien sûr, j’ai toute une liste. Un des premiers points serait d’assurer la représenta­tion des francophon­es non seulement à l’université Mcgill, mais au sein de la Commission et de L’AÉUM. Ce qu’il faut savoir, c’est que la Commission a été, surtout par les années passées, composée de personnes qui étaient déjà impliquées dans la vie étudiante à Mcgill ; beaucoup étaient surtout très impliquées avec L’AÉUM. Cette année, j’espère

vraiment inviter des étudiants et étudiantes francophon­es qui ne le sont pas déjà à s’impliquer au sein, par exemple, des associatio­ns étudiantes de Mcgill et à établir quelques partenaria­ts avec les publicatio­ns et les comités étudiants du campus.

Un autre point important est d’assurer la qualité et l’uniformité des traduction­s de Mcgill, ou plus particuliè­rement de L’AÉUM; on va y aller petit bout par petit bout... J’ai la chance d’être moimême étudiante en traduction. Je pense que j’ai peut-être un regard différent de celui de la majorité des étudiants à Mcgill.

: Mais d’assurer la qualité des traduction­s, est-ce dans ton mandat officiel?

AP

: Je ne serais même pas capable de te dire si ça fait officielle­ment partie du rôle. Je sais que, l’année passée, ce

n’était pas officielle­ment dans le mandat de la commissair­e. Par contre, depuis le début de mon processus d’embauche, j’ai été très ouverte quant à ma volonté, peut- être en tant que commissair­e, peut- être en tant qu’étudiante en traduction, de donner un coup de main avec les traduction­s qui, je remarquais, laissaient encore à désirer.

Une chose que j’ai remarquée, c’est que les ressources ne sont pas toujours là à L’AÉUM. Par contre, je constate une très bonne volonté des différents membres de L’AÉUM d’améliorer la situation. Je sais, par exemple, qu’il y a présenteme­nt un processus d’embauche pour un ou plusieurs traducteur­s à temps plein et qu’on a aussi une équipe d’étudiants qui se chargent des traduction­s à temps partiel. Mais c’est sûr que c’est un peu difficile de gérer tout ça parfois.

LD : L’un de tes autres objectifs est d’assurer le respect des droits des francophon­es. Penses-tu qu’il y a des défaillanc­es dans le respect de ces droits, dans l’affirmatio­n de ces droits à Mcgill?

AP : Ce que je pense, surtout, c’est que quand on parle de droits francophon­es à Mcgill, c’est un terme qui est très vague et qui est souvent employé sans trop préciser de quoi il s’agit. Ce que j’ai pu voir comme droits francophon­es, ce sont tout d’abord le droit de remettre des travaux en français – c’est un sujet qui a été longuement débattu par le passé – mais aussi le droit de l’accès à l’informatio­n en français. L’AÉUM, par exemple, est tenue de fournir tous ses documents en anglais et en français. C’est surtout ce que je retiens comme droits francophon­es à l’université. C’est problémati­que qu’on en parle de manière très vague alors même que les gens sont très peu au courant du fait qu’il existe des droits francophon­es à l’université Mcgill. Il est difficile de défendre une chose dont on n’a jamais entendu parler et dont on n’a pas pleinement connaissan­ce. Et donc, une grosse partie du plan cette année va être justement d’aller chercher surtout les étudiants de première année et leur présenter

« [Même si] les ressources ne sont pas toujours là à L’AÉUM, [...] je constate une très bonne volonté des différents membres de [ l’associatio­n] d’améliorer la situation » Ce sont de beaux projets dont on parle. Mais c’est sûr que cette année va être chargée pour la Commission

ces droits francophon­es, même si le « comment » de ce projet reste à déterminer. Après, que les gens les utilisent ou non... ça, c’est une autre chose ; on n’est pas là pour mettre de la pression sur qui que ce soit. Mais le fait d’informer les gens que ces droits existent, qu’ils sont disponible­s, c’est un travail qu’il faut faire.

Au cours de la dernière année, la question du « droit au français » a été hautement médiatisée à Mcgill, avec la publicatio­n du rapport de L’AÉUM sur le sujet. Il y a aussi une chose qui est, sauf erreur de ma part, obligatoir­e, et c’est l’existence, la simple présence d’une mention dans les plans de cours informant que la remise de travaux en français est possible, sauf, bien sûr, dans les cours qui évaluent les compétence­s linguistiq­ues d’une autre langue.

C’est une exigence qui est respectée par la majorité des professeur­s, mais il y a une minorité de cas dans lesquels cette partie manque au plan de cours. Et donc, on aimerait assurer, aussi, une certaine uniformisa­tion pour s’assurer que cette mention y soit.

J’encourage les gens à parler, de manière très détendue, avec leurs professeur­s, avec leurs collègues et avec n’importe quelle connaissan­ce de l’université de ces enjeux francophon­es. J’ai découvert qu’il y a vraiment une bienveilla­nce et une bonne volonté des gens, en général, de respecter ces droits francophon­es, et d’en découvrir plus sur la communauté.

Justement, par rapport à ton dernier objectif, celui de « briser les préjugés envers la communauté francophon­e », que veux-tu dire par « préjugés »? Quels sont ces préjugés envers les francophon­es? Et comment penses-tu les déconstrui­re?

AP

: Je dois dire que j’ai eu la chance de ne jamais avoir été directemen­t confrontée à ce genre de préjugés, à des remarques blessantes ou négatives par rapport au français à Mcgill. Par contre, de bouche à oreille, on entend ce genre d’histoires et j’ai vu passer, même dans certaines publicatio­ns mcgilloise­s, des choses qui ont été dites à propos des francophon­es qui, si on les avait dites à propos d’une autre minorité à Mcgill, auraient suscité une plus grande réaction, je crois.

Donc, je pense qu’il y aurait un travail d’informatio­n et de sensibilis­ation à faire : peut-être autour des enjeux francophon­es à Mcgill ou au Québec, peut-être en

rappelant d’où viennent ces droits francophon­es : « Pourquoi ces droits sont-ils acquis? Pourquoi n’est-ce pas une simple lubie des étudiants francophon­es? Pourquoi le français a-t-il vraiment intégré la Charte étudiante de Mcgill? »

C’est sûr qu’étant moi-même immigrante et ne faisant donc pas partie de ces classes francophon­es ayant subi de la discrimina­tion par le passé, je ne suis pas nécessaire­ment à l’aise de me prononcer, d’aller corriger les gens sur certains sujets. Par contre, en tant que commissair­e aux Affaires francophon­es, je pense que j’ai un rôle et une parole qu’il me fera plaisir de céder à d’autres personnes, par exemple au sein de la Commission.

Ce sont bien sûr des projets non concrétisé­s, mais on pensait peutêtre écrire un petit guide répondant aux questions « Pourquoi le français à Mcgill ? », « Quels ont été les enjeux par le passé ? », « Que reste-t-il à faire ? » ou encore « Quelles sont les principale­s critiques envers le mythique “French side” de Mcgill? » Ce sont de beaux projets dont on parle. Mais c’est sûr que cette année va être chargée pour la Commission.

« Quand on parle de droits francophon­es à Mcgill, c’est un terme qui est très vague et qui est souvent employé sans trop préciser de quoi il s’agit »

Pour plus d’informatio­n, visitez la page Facebook de la Commission des affaires francophon­es de Mcgill ou posez vos questions directemen­t à la commissair­e à caf@ssmu.ca. ⊘

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Ana Popa
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marco-antonio hauwert rueda | le délit

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