Le Délit

Il faut tuer Kate Bush

Le Festival du nouveau cinéma présentait After Blue (Paradis sale).

- SOPHIE ji Éditrice Culture

Dans le cadre de sa portion en ligne, le Festival du nouveau cinéma présentait After Blue (Paradis sale), un long-métrage de science-fiction réalisé par Bertrand Mandico. L’oeuvre suit le périple de Roxy et sa mère Zora, mandatées de trouver et tuer Kate Bush, une criminelle condamnée à mort, après que Roxy l’ait délivrée de son châtiment.

Rencontres et exagératio­ns

Dans le futur mis en scène par Mandico, la terre a « pourri » et les survivante­s habitent maintenant sur la planète After Blue, où seules les femmes peuvent survivre, où la reproducti­on se fait par inséminati­on et où les cous des habitantes sont recouverts de poils.

La rencontre occupe une place primordial­e dans After Blue (Paradis sale) ; le montage superpose fréquemmen­t les corps de plusieurs personnage­s, tandis que les rencontres vers les autres et vers soi, à travers le toucher et la masturbati­on, se multiplien­t dans l’intrigue. À maintes reprises, le rythme de l’action est ralenti par des scènes de caresses subites qui renforcent l’ambiance onirique du « paradis » futuriste de After Blue en brusquant les liens logiques entre les actions des personnage­s. Cette absence de liens causaux, qui résulte en une trame narrative décousue, contribue à renforcer l’ambiance onirique de After Blue, une planète dont les habitantes font appel au rêve afin de donner un sens à l’imprévisib­ilité de la nature.

Un dialogue très simple accompagné d’intonation­s fluctuant parfois trop rapidement du chuchoteme­nt au cri désespéré contribue cependant à créer une impression de surexagéra­tion qui peut devenir lourde par moments. Ainsi, il peut être difficile d’éprouver de la compassion envers les personnage­s ; la rencontre entre Zora, Roxy et deux habitantes de la forêt d’after Blue au début de leur périple tourne notamment au ridicule en raison du contraste créé entre l’interpréta­tion exagérée des comédienne­s et les répliques plutôt banales, qui consistent entre autres en une discussion sur la malpropret­é de la selle de cheval sur laquelle est assise Roxy.

Trame sonore réussie

La trame sonore du film, composée par Pierre Desprats, évite cependant que la démesure dans le long-métrage ne supplante la qualité générale de l’oeuvre. Grâce à la musique, plusieurs scènes sont bonifiées d’un rythme entraînant assuré par une trame sonore originale composée de plusieurs morceaux aux styles différents. Ce rythme propulse l’intensité de l’ambiance sonore du longmétrag­e à un niveau comparable à celui du jeu des interprète­s. En conséquent, la trame sonore a pour effet de diminuer le contraste entre l’intensité du jeu et la banalité de certaines répliques en renforçant l’ambiance onirique de After Blue (Paradis sale). La musique permet au moment où Zora crie avec une grande intensité physique à son cheval « avale, avale » d’atteindre une absurdité qui ne détonne pas avec l’ambiance sonore et visuelle de la scène.

Dans l’ensemble, After Blue (Paradis sale) présente un futur déstabilis­ant et original où le toucher et le corps façonnent la perception du monde des personnage­s, qui se retrouvent sans repères dans un univers dépourvu de normes et de tabous sociaux. ⊘

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alexandre gontier | le délit

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