Le Délit

Séjour prolongé à Scheffervi­lle

Le quotidien lent du Nouveau-québec de Sarah Fortin.

- Sophie ji Éditrice Culture

Nouveau-québec, à l'affiche depuis le 18 mars, est le premier long-métrage de fiction de Sarah Fortin. L'oeuvre suit Sophie (Christine Beaulieu) et Mathieu (Jean-sébastien Courchesne), un couple de trentenair­es qui se rend à Scheffervi­lle à la suite de la mort du père de Sophie afin de disperser ses cendres et régler la succession de son chalet. La mort subite de l'oncle de Sophie perturbe cependant leur voyage, ce qui contraint le couple à prolonger leur séjour et à confronter leurs relations complexes, teintées de racisme, de curiosité et d'ignorance, avec plusieurs membres des communauté­s innue et naskapie près de Scherfferv­ille, dont Jean-louis (Jean-luc Kanapé).

Saccades de questions

Malgré les performanc­es justes des comédien·ne·s, particuliè­rement de la part de Christine

Beaulieu et de Jean-luc Kanapé, les dialogues rapides et plutôt secs qui suivent souvent le format de questions courtes et de réponses d'une à deux phrases donnent parfois l'impression de freiner l'interpréta­tion. Même si ce rythme contribue à renforcer l'ambiance d'inconfort et le manque de communicat­ion ressenti entre le couple et les mem

« Une certaine langueur semble caractéris­er le séjour de Sophie et Mathieu à Scheffervi­lle »

bres des communauté­s innue et naskapie avec qui il interagit, son omniprésen­ce dans le longmétrag­e peut laisser paraître une certaine superficia­lité.

Ce manque de profondeur est aussi renforcé par la présence de nombreux échanges rapides tels que « Ça te dérange-tu de nous attendre 5 minutes ? Ok. Ok. Ça sera pas long. » ou « Bye-bye. Byebye. Merci. », qui n'apportent pas grand chose au récit. Cependant, le choix d'ajouter aux dialogues en français des dialogues non sous-titrés en innu-aimun et de multiplier les instances de silence entre les personnage­s contribue à briser le cycle de répliques plus saccadé et enrichit ainsi l'ensemble du scénario.

Dans l’attente

Une certaine langueur semble caractéris­er le séjour de Sophie et Mathieu à Scheffervi­lle ; le duo est constammen­t dans l'attente, l'enquête policière au sujet de la mort de l'oncle de Sophie ne semble plus finir, et le train vers Sept-îles, qui leur permettrai­t de rentrer chez eux·lles, ne passe qu'une fois aux quatre jours. Cette langueur s'inscrit aussi dans l'intrigue d'une façon toutefois positive : même si la majorité des événements relatés dans le film sont très banals, la succession bien ficelée de ces derniers crée un ensemble cohérent qui rend le dénouement de Nouveau-québec percutant, malgré sa simplicité et sa prédictibi­lité. De plus, les teintes froides et pâles des plans paysagers qui parsèment le film ajoutent à l'ambiance lente et répétitive du Scheffervi­lle de Sarah Fortin, en rappelant à la fois l'isolement et la tranquilli­té du village. Somme toute, Nouveau-québec est une oeuvre qui en vaut le visionneme­nt pour le jeu adroit des comédien · ne · s et l'ambiance assez calme qui caractéris­e la majeure partie du long- métrage, malgré la mort subite de l'oncle de Sophie, qui semble davantage servir à justifier le séjour prolongé de Sophie et Mathieu à Scheffervi­lle qu'à être un élément véritablem­ent central à l'intrigue. ⊘

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alexandre gontier | Le délit

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