Le Devoir

Restaurant Ça brasse dans le poulailler rue Notre-Dame Ouest

- BIRD BAR ★★★1/2 $$$1/2 JEAN-PHILIPPE TASTET www.tastet.ca

Autant vous prévenir tout de suite, si vous êtes sensible du sonotone, ne lisez pas plus loin, ce Bird Bar n’est pas dans le registre «Murmures et suçotement­s». On vise plutôt ici «Vibrations et voracité joyeuses » ; et ça caquette gaiement. En revanche, si vous aimez la fête, vous aurez beaucoup de plaisir à vous joindre à la foule de gourmands affamés qui se presse à l’angle des rues Notre-Dame et Saint-Martin, où Bird Bar s’est installé.

Pressentan­t une soirée endiablée, j’appelai à la rescousse mon ami Pierre, arguant du fait qu’ayant le patronyme du saint susmention­né, il était obligé de m’accompagne­r. Pierre mange comme moi, c’est-à-dire trop, mais avec enthousias­me, et comme moi également, il aime les bons repas qui ne s’éternisent pas. Nous avons été comblés au Bird Bar.

De la rue, l’endroit est invitant, décor et lumière tout aussi engageants. Pousser la porte du Bird Bar, c’est entrer dans un autre univers. Un vendredi soir après une semaine sur les chapeaux de roues, c’est comme un électrocho­c, une plongée revigorant­e.

Le temps de me rendre à ma place, au long comptoir, sous la houlette d’un guide avenant à la longue barbe blanche, mes tympans avaient compris que la soirée serait festive.

Le temps de supposer que la jeune fille derrière le bar avait, sans doute par étourderie, acheté une robe une ou deux tailles trop petites, mes papilles me rappelèren­t que nous étions venus ici pour manger et travailler.

Le menu du Bird Bar est rempli de facéties et de clins d’oeil sympathiqu­es: «Oreilles d’éléphant», «Truffe’n’cheese» et autres «Poutine Bird Bar, avec croquettes au poulet et jalapeño ».

Le menu du resto est aussi rempli de générosité et de délices. En entrée, cet os à moelle, tronçonné en long comme le veut la mode actuelle et cuit au four, remplissai­t parfaiteme­nt sa mission apéritive. Accompagné d’un peu d’oignons confits et de pain grillé, il était présenté sur un lit de bonne conscience, en l’occurrence des épinards sautés.

Dans cet esprit décalé qui en fait un être exceptionn­el, Pierre choisit le «Pogo Wagyu, jalapeño et maïs marinés maison, chutney de tomates, sauce de Dijon et miel, frito crunch». Suit un dialogue rythmé par la course endiablée du shaker manié par la virevoltan­te barmaid: « Du wagyu ? T’es sûr? Ça s’appelle pas Boeuf Bar, mais Bird Bar. » Impassible, Pierre répond: «Je sais. » Il est comme ça, Pierre, synthétiqu­e. Et son pogo s’avère distrayant, peut-être pas inévitable, mais distrayant.

Le poulet suit, puisque sous diverses formes c’est quand même la pièce centrale du menu de ce Bird Bar. Sagement, nous choisisson­s le «Double régal», deux morceaux de poulet dans une friture peut-être un peu épaisse, mais qui ne manque pas d’intérêt. Deux gros morceaux de poulet charnus, tendres, juteux.

La maison précise : «On vous parle de poulet naturel et de qualité, élevé en liberté et avec amour à la ferme familiale des Voltigeurs, et nourri aux grains végétaux de provenance locale. De plus, nous avons mis en place un système Éco-chef pour obtenir des aliments frits de 40 à 60% plus faibles en gras.» Ceci explique sans doute cela.

Avec ses délicieux morceaux de poulet, Bird Bar propose une quinzaine de sauces en accompagne­ment. Sur la demi-douzaine essayée, celles qui sont relevées — srirachaér­able, chimmuchur­ri ou mangue pimentée — se distinguen­t et complètent bien le poulet. En accompagne­ment supplément­aire, cet écrasé de pommes de terre était parfait.

Nous avons résisté au dessert proposé par la sémillante jeune personne, non pour la contrarier, mais par manque de place, les portions étant ici plantureus­es.

Dans ce poulailler, Kimberly Lallouz occupe le perchoir du haut, d’où elle surveille les opérations avec la plus grande attention. Elle s’assure que les caquètemen­ts et gloussemen­ts de plaisir viennent des tables et non des gens au service. Au rythme où sortent les plats, le personnel en cuisine, lui, n’a pas tellement le loisir de papoter. On doit à Mme Lallouz le menu qu’elle a composé en pensant à notre bien. Je l’ai remerciée à l’avance de votre part et de la nôtre, tant notre soirée avait été divertissa­nte et délicieuse.

BIRD BAR 1800, rue Notre-Dame Ouest Montréal 514 938-4343

Ouvert à midi du lundi au vendredi et en soirée du mardi au dimanche. Brunch les samedis et dimanches. Une quinzaine de petits plats, pas si petits que ça par ailleurs, entre 11 $ et 22$. Une section «Manger du jardin» avec cinq propositio­ns de 12 $ à 14 $ et sept «Grands plats» de 17,50$ à 28$. Le poulet frit est offert en une demi-douzaine de versions allant du « Double régal » à 15$ pour deux morceaux, à la «Famjam» de 12 morceaux, frites et salade pour 72 $.

Moins enthousias­te que d’habitude, mon éminent collègue Jean Aubr y commente la carte des vins en grinçant un peu : «Avec cette carte pas nécessaire­ment clémente côté prix, où les importatio­ns privées sont une fois de plus trop cher payées, nul besoin de s’entendre parler pour déguster. Une carte orpheline et désincarné­e qui aurait avantage à être resserrée et plus “sentie” côté coeur.»

Avec ses délicieux morceaux de poulet, Bird Bar propose une quinzaine de sauces en accompagne­ment

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 ?? PEDRO RUIZ LE DEVOIR ?? Pousser la porte du Bird Bar, c’est entrer dans un autre univers où musique vibrante et portions plantureus­es font le plaisir des clients.
PEDRO RUIZ LE DEVOIR Pousser la porte du Bird Bar, c’est entrer dans un autre univers où musique vibrante et portions plantureus­es font le plaisir des clients.

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