Le Devoir

Où sont les matantes et les mononcles de M. Legault ?

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Dans une entrevue de François Legault publiée dans Le Devoir du samedi 25 février 2017, le chef caquiste affirme que le regroupeme­nt familial de la politique d’immigratio­n fédérale pose un problème pour le Québec étant donné que non seulement les conjoints, les enfants et les parents des immigrants immigrent, mais qu’en plus «ce sont les mononcles, les matantes, les cousins…». Il affirme également qu’il y a «zéro condition». Ces déclaratio­ns sont erronées. D’abord, les oncles et les tantes sont inadmissib­les dans la catégorie «autres» du regroupeme­nt familial, cette dernière incluant «un frère, une soeur, un neveu, une nièce, un petit-fils ou une petite-fille, qui est orphelin de père et de mère, est âgé de moins de 18 ans». De plus, cette composante ne représente que 1,5% de tous les immigrants admis au Québec entre 2011 et 2015! Le regroupeme­nt familial se fait dans le cadre d’un contrat de parrainage exigeant un revenu élevé de la part du garant qui s’engage à subvenir aux besoins de la personne parrainée pendant une période prolongée (10 ans). Quant à l’affirmatio­n de M. Legault selon laquelle cette population ne parle pas le français, elle est également erronée, car près de 50% des personnes admises dans la catégorie regroupeme­nt familial connaissai­ent le français sur la période 2011-2015. Rappelons que le Québec effectue une vérificati­on du revenu des garants et délivre un certificat de sélection du Québec aux immi- grants de cette catégorie. Signalons qu’il est extrêmemen­t difficile pour les immigrants de faire venir des membres de leur famille autres que leur conjoint ou leurs enfants étant donné les règles d’immigratio­n établies par le fédéral. La part du regroupeme­nt familial dans l’immigratio­n totale a significat­ivement diminué depuis le début des années 1980 au profit de l’immigratio­n économique. Le regroupeme­nt familial favorise une insertion réussie au Québec, car les membres de la famille apportent souvent un soutien aux membres actifs sur le marché du travail, en plus du bien-être général que procure le fait de vivre avec ses proches. La réunificat­ion familiale favorise aussi la rétention et l’établissem­ent à long terme des immigrants au Québec. Les déclaratio­ns de M. Legault représente­nt encore un exemple déplorable du recours à de fausses affirmatio­ns sur l’immigratio­n à des fins électorali­stes. Il importe de lutter contre la désinforma­tion créée par de telles déclaratio­ns. Danièle Bélanger, professeur­e titulaire et directrice des programmes de 2e et de 3e cycle en sciences géographiq­ues à l’Université Laval Le 26 février 2017

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