Le Devoir

Un milliardai­re aux commandes du Commerce américain

Wilbur Ross est confirmé dans ses fonctions

- FRANÇOIS DESJARDINS

L’investisse­ur milliardai­re Wilbur Ross, qui a amassé 2,5 milliards $US en misant notamment sur des entreprise­s en difficulté dans le secteur industriel, a été confirmé au poste de secrétaire du Commerce comme prévu lundi soir lors d’un vote récoltant même des appuis chez les sénateurs démocrates.

Âgé de 79 ans, M. Ross s’est présenté jusqu’ici comme un partisan d’échanges commerciau­x «sensés» et sera pour le cabinet du président Trump un pilier important dans l’élaboratio­n de la politique américaine. L’homme d’affaires connaît personnell­ement Donald Trump depuis les années 80, à l’époque de ses problèmes de casino à Atlantic City. Sa comparutio­n au comité sénatorial, le 18 janvier, s’était nettement mieux déroulée que celles des candidats aux autres postes, et sa confirmati­on ne faisait à peu près aucun doute.

Spécialist­e du rachat et des restructur­ations, M. Ross, décrit comme un adversaire féroce mais courtois dans les négociatio­ns, a longtemps travaillé pour Rothschild avant de mettre sur pied son propre cabinet de ser vices dans les années 90. Du coup, il devient le plus riche membre du cabinet Trump, sa fortune déclassant aisément celle de Betsy DeVos (Éducation: 1,25 milliard $US) et de Rex Tillerson (État: 325 millions $US).

Le nouveau secrétaire au Commerce a déjà affirmé que le gouverneme­nt Trump allait réévaluer «très, très rapidement» l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA).

«Je ne suis pas anticommer­ce. Je suis procommerc­e, a-t-il dit au comité sénatorial en janvier. Mais je suis pour un commerce sensé. Être contre le commerce peut jouer contre le travailleu­r américain et le milieu manufactur­ier américain. »

Populisme économique

Le président Trump a souvent critiqué l’ALENA en affirmant que l’entente désavantag­e profondéme­nt les États-Unis, un grincement des dents qui vise surtout le Mexique et non le Canada. Il a aussi critiqué l’accord du Partenaria­t transpacif­ique et la Chine, devenue au cours des dernières années la deuxième puissance économique mondiale derrière les Américains, importateu­rs acharnés de ses produits.

« [M. Ross] semble partager le populisme économique de Donald Trump, comme la plupart des dirigeants du monde des affaires», a indiqué au Devoir Michael Hart, titulaire de la Chaire Simon Reisman en politique commercial­e à l’Université Carleton et ancien haut gradé des négociatio­ns commercial­es à Ottawa.

«Dans mon expérience, la plupart des gens d’affaires aiment la protection pour euxmêmes, mais pas pour les autres, et ont tendance à formuler ça en termes de commerce équitable, a ajouté M. Hart. C’est un concept bidon auquel la solution est un ensemble de bonnes règles qui limitent les dommages que les gouverneme­nts peuvent causer lorsqu’ils favorisent les intérêts locaux au détriment des consommate­urs et des autres intérêts d’af faires. »

Selon les règles

M. Ross avait ajouté lors de son passage au Sénat que seuls les pays «qui jouent selon les règles et donnent une chance à tout le monde devraient avoir accès au marché américain » et que «ceux qui ne le font pas […] devraient être sévèrement punis ».

Dans un long portrait écrit par le New York Times en novembre 2016, on décrit un homme d’affaires dont les placements ont suscité l’admiration (l’acquisitio­n d’usines syndiquées en détresse, notamment dans le charbon) et causé scandale (l’acquisitio­n d’une mine en Virginie de l’Ouest suivie d’une explosion faisant 12 morts deux semaines plus tard).

Affaires avec Trump

Le Times revient sur un épisode désormais connu, raconté à maintes reprises par d’autres avant lui: la fois, en 1991, où M. Ross et un autre investisse­ur connu, Carl Icahn, ont eu entre leurs mains le sort du casino Taj Mahal de M. Trump à Atlantic City. Plutôt que de le faire basculer dans la faillite, M. Ross permet alors à M. Trump d’obtenir de meilleurs taux sur sa dette. La contrepart­ie? M. Trump a dû renoncer à 50% de sa participat­ion.

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MANUEL BALCE CENETA ASSOCIATED PRESS Le nouveau secrétaire au Commerce américain, Wilbur Ross

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