Le Devoir

Le débat sur l’utilisatio­n des toilettes publiques se transporte à Ottawa

- HÉLÈNE BUZZETTI Correspond­ante parlementa­ire à Ottawa

Le débat sur l’utilisatio­n des salles de bain publiques par les personnes transgenre­s a déchiré certains États américains et s’amène maintenant au Sénat du Canada. Un conservate­ur dit craindre l’inconfort que pourrait susciter la présence de personnes transgenre­s dans les vestiaires publics, en particulie­r pour les femmes voilées.

Le gouverneme­nt de Justin Trudeau a déposé un projet de loi qui ajoutera explicitem­ent l’identité de genre à la liste des motifs de discrimina­tion prohibés. Le C-16 a été adopté à la Chambre des communes et est débattu au Sénat depuis novembre. Ce n’est que cette semaine que des opposants ont pris la parole pour la première fois. Et l’argument des salles de bain a été évoqué par deux sénateurs. Ces opposants craignent qu’en interdisan­t la discrimina­tion, les établissem­ents publics seront obligés de permettre aux transgenre­s d’accéder aux toilettes de leur genre identitair­e plutôt que biologique.

« Sommes-nous à l’aise à l’idée de se changer et de prendre une douche à côté d’une personne en apparence du sexe opposé? Je n’en suis pas convaincu, a lancé le sénateur conservate­ur Tobias Enverga. Je soupçonne que le nombre de personnes mal à l’aise à cette idée est plus élevé que le nombre de transgenre­s. »

M. Enverga, lui-même d’origine philippine, a rappelé que le Canada accueillai­t beaucoup d’immigrants d’origines et de croyances diverses qui ne seraient pas nécessaire­ment à l’aise avec cette idée, en particulie­r les femmes musulmanes voilées. «Si une personne n’est pas prête à montrer ses cheveux à un homme, comment cette personne se sentira-t-elle à l’idée de partager un espace d’intimité tel qu’un vestiaire avec des gens qui semblent appartenir au sexe opposé?»

Mardi, c’est la sénatrice conservatr­ice Lynn Beyak qui s’est opposée au C-16 au motif qu’il était «superflu», la discrimina­tion étant déjà interdite par la Charte des droits et libertés.

«Pierre Elliott Trudeau avait raison, il y a des décennies, lorsqu’il a dit que l’État n’a rien à faire dans la chambre à coucher des gens. Selon moi, cela vaut aussi pour la cuisine, le couloir, le sous-sol et la salle de bain», a-t-elle déclaré.

Mme Beyak en a profité pour déplorer que les enfants reçoivent des cours d’éducation sexuelle à l’école plutôt que de leurs parents. «On leur apprend à enfiler des préservati­fs sur des concombres et on leur demande s’ils préfèrent être un garçon ou une fille avant même qu’ils comprennen­t vraiment la différence entre les deux. N’est-il pas temps que nous mettions de l’ordre dans nos priorités?»

 ?? DARRYL DYCK LA PRESSE CANADIENNE ?? Une salle de bain ouverte à tous, peu importe l’identité sexuelle, à l’Université Simon Fraser
DARRYL DYCK LA PRESSE CANADIENNE Une salle de bain ouverte à tous, peu importe l’identité sexuelle, à l’Université Simon Fraser

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