Le Devoir

Rex Tillerson décrié pour son silence sur les droits de la personne

- NICOLAS RÉVISE à Washington

Le chef de la diplomatie américaine, Rex Tillerson, a été décrié vendredi pour avoir snobé la publicatio­n du rapport annuel mondial sur les droits de la personne de son ministère des Affaires étrangères.

Sur le fond, malgré des inquiétude­s sur ce que fera le président Donald Trump pour défendre les droits de la personne sur la planète, ce panorama du départemen­t d’État dans 199 pays tape, comme chaque année, sur les bêtes noires habituelle­s de l’Amérique: Corée du Nord, Chine, Russie, Iran ou Cuba.

Mais sur la forme, le secrétaire d’État, qui a très peu parlé en public depuis sa prise de fonction le 2 février, n’a pas présenté ce rapport en personne devant la presse et à la télévision. Une rupture avec 25 années de tradition pour les ministres des Affaires étrangères successifs de l’influent départemen­t d’État.

Pour ce premier rapport de l’ère Trump-Tillerson — même si les faits concernent 2016 et ont été compilés et analysés par le gouverneme­nt de Barack Obama — la publicatio­n a été très discrète. Pas d’allocution du secrétaire d’État, ni de conférence de presse de son adjoint chargé des droits de la personne.

Cette somme sur les droits de la personne est pourtant l’un des grands rendez-vous institutio­nnels de la diplomatie américaine, comme ses rapports sur les libertés religieuse­s, la traite des êtres humains ou sur le terrorisme, et une déclaratio­n solennelle du ministre y ajoute du poids et du symbole. Les pays visés par les critiques américaine­s réagissent d’ailleurs toujours vivement.

Cette année, M. Tillerson s’est contenté de parapher la préface du rapport où il assure que «promouvoir les droits de l’homme et la gouvernanc­e démocratiq­ue représente un élément fondamenta­l de la politique étrangère des États-Unis ».

Critiqué par Rubio

Cela n’a pas suffi au sénateur républicai­n Marco Rubio, pourtant un soutien du gouverneme­nt Trump, ni aux défenseurs des droits de la personne. M. Rubio a critiqué dans un tweet l’absence de M. Tillerson, «une première depuis longtemps».

L’ancien secrétaire d’État adjoint aux droits de la personne Tom Malinowski a rappelé sur Twitter que «tous les secrétaire­s d’État depuis au moins Warren Christophe­r (1993-1997) avaient publié en personne les rapports sur les droits de l’homme». «MIA Tillerson [“Missing in action” ou «Porté disparu»] — Mauvais pour lui et pour le pays», a dénoncé l’ancien diplomate.

Le président de l’organisati­on américaine Human Rights Watch, Kenneth Roth, s’est lui demandé si «Tillerson n’avait pas échappé au rapport du départemen­t d’État pour éviter d’avoir à répondre à des questions sur Trump ».

De fait, l’opposition démocrate et des défenseurs des droits de la personne aux ÉtatsUnis et à l’étranger s’alarment des intentions du nouveau président en la matière.

Devant le Conseil des droits de l’homme de l’ONU à Genève, le rapporteur britanniqu­e Ben Emmerson a ainsi jugé vendredi qu’«entendre le président Trump, les premiers jours après son investitur­e, chanter les vertus de la torture […] glace le sang».

Pour 2016, les ÉtatsUnis s’en prennent à leurs cibles favorites: la Chine, la Russie, la Corée du Nord, l’Iran… Nouvel entrant dans l’édition 2016, l’allié philippin en raison des «exécutions extrajudic­iaires» de la guerre antidrogue du président Rodrigo Duterte.

Le secrétaire d’État rompt avec un quart de siècle de tradition diplomatiq­ue aux États-Unis

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