Le Devoir

Janet Yellen ouvre la voie à une nouvelle hausse des taux

- JEREMY TORDJMAN à Washington

La présidente de la banque centrale américaine (Fed) a clairement ouvert la voie à une nouvelle hausse des taux américains en mars, qui serait la première depuis que Donald Trump s’est installé à la Maison-Blanche en janvier.

«Si l’emploi et l’inflation continuent d’évoluer conforméme­nt à nos attentes, un nouvel ajustement des taux fédéraux sera dans ce cas probableme­nt justifié », a déclaré Janet Yellen dans un discours à Chicago. Le comité monétaire de la Fed, qui se réunit les 14 et 15 mars, procéderai­t ainsi à un troisième relèvement depuis l’éclatement de la crise financière en 2008. La dernière hausse, en décembre, avait assigné une fourchette de 0,5% et 0,75% à ces taux, qui influent sur le coût du crédit.

Selon Mme Yellen, le resserreme­nt de la politique monétaire serait justifié du fait de perspectiv­es économique­s encouragea­ntes aux États-Unis et, surtout, en raison de l’affaibliss­ement apparent des risques en provenance de l’étranger. Ces deux dernières années, la banque centrale avait plusieurs fois suspendu sa normalisat­ion monétaire face au choc du Brexit britanniqu­e et certaines turbulence­s financière­s en provenance de Chine.

Réplique

Dans son discours, Mme Yellen a d’ailleurs tenu à répondre à certains qui avaient critiqué la Fed pour avoir, selon eux, trop attendu pour mettre un terme à sa politique de taux zéro, mise en place pour soutenir la reprise.

Pendant sa campagne, Donald Trump avait ainsi accusé la Fed de ne pas relever ses taux pour ne pas provoquer de turbulence­s pour la fin du double mandat de Barack Obama. Il n’a toutefois pas réitéré ces critiques depuis son arrivée à la Maison-Blanche. «Je ne vois pas de signe que la Réserve fédérale ait tardé à agir»,a répliqué la dirigeante, tout en convenant que la normalisat­ion monétaire serait à l’avenir «probableme­nt moins lente » qu’en 2015 et 2016.

Progrès de l’économie

Sur le plan intérieur, M me Yellen s’est félicitée que la Fed soit en passe d’atteindre les deux objectifs qui lui sont fixés par la loi: le plein-emploi et une inflation annuelle stabilisée autour de 2%. «L’économie américaine a accompli de

grands progrès», a affirmé la présidente, à revers du sombre diagnostic du locataire de la Maison-Blanche, qui assure avoir hérité d’un chaos économique. Le taux de chômage américain évolue sous la barre symbolique des 5% depuis près d’un an et les prix à la consommati­on ont accéléré leur progressio­n pour frôler la cible de la Fed (1,9 % en janvier).

Mme Yellen, dont le mandat arrive à son terme en janvier 2018, a toutefois prévenu que l’économie américaine continuait à faire face à d’importants défis. L’expansion économique actuelle est la «plus faible» depuis la Seconde Guerre mondiale, avec un taux de croissance moyen de 2% marqué par une lente progressio­n de la population active et une productivi­té décevante, a relevé la responsabl­e.

Classe moyenne

Mme Yellen a également souligné que les revenus hors inflation des classes moyennes étaient toujours un peu plus bas qu’avant la récession de 2008-2009 alors que ceux des plus fortunés avaient augmenté. «Les gains durant cette reprise économique ont penché en faveur des plus hauts revenus, comme c’est le cas depuis un certain temps», a déploré la dirigeante, regrettant également que la situation économique des minorités noires et hispanique­s soit moins favorable que celle des Blancs.

Mme Yellen a toutefois estimé que c’était au pouvoir politique et pas à la banque centrale de corriger le tir, lançant ainsi une pierre dans le jardin de Donald Trump. «Les politiques budgétaire­s et réglementa­ires — qui sont bien sûr de la responsabi­lité du gouverneme­nt et du Congrès — sont les mieux placées pour s’attaquer à ces tendances structurel­les», a-t-elle affirmé.

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