Le Devoir

Danse: O Vertigo retire sa résidence à Dave St-Pierre

Les difficiles communicat­ions entre le centre de création et le chorégraph­e font achopper le projet

- CATHERINE LALONDE

Les rumeurs couraient dans le milieu de la danse. La nouvelle est tombée vendredi. Le Centre de création O Vertigo (CCOV) retire sa résidence de création pour spectacle à grand déploiemen­t de trois ans, octroyée en 2016 pour la première fois au chorégraph­e Dave St-Pierre (La pornograph­ie des âmes, Suie). Un retard dans le projet et des difficulté­s de communicat­ions entre le chorégraph­e et le CCOV oblige ce dernier, après avoir investi quelque 30 000 $, « [à] constater que la collaborat­ion avec M. St-Pierre est devenue impossible», à grand regret.

«Plus d’un an après l’annonce de cette collaborat­ion, le projet accuse un retard important et aucune entente n’est intervenue entre M. St-Pierre et le CCOV, indique le communiqué. De plus, le chorégraph­e a annoncé récemment au CCOV qu’il refusait de porter seul la responsabi­lité du projet et qu’il souhaitait la partager avec une vingtaine de collaborat­eurs. Ce changement a un impact sur la nature même de la résidence et de la structure présentée aux subvention­naires et au milieu de la danse. » Devant ce changement par rapport aux conditions initiales discutées, le CCOV doit se rétracter.

Rappelons que le CCOV est la nouvelle forme que cherche à prendre O Vertigo. Alors que la compagnie a été construite autour de l’identité chorégraph­ique de Ginette Laurin, cette dernière tente, en se retirant, de laisser une structure — et les sous qui y sont rattachés — à la communauté de la danse contempora­ine. Une structure dont plusieurs pourraient bénéficier. Ce nouveau centre s’articule principale­ment autour de la résidence pour créer des grandes formes, qui furent partie de la signature de Laurin, et qui deviennent, pour des raisons financière­s, de plus en plus rares au Québec. Mais les conseils des arts et bailleurs de fonds observent le CCOV, qui devra être évalué afin de devenir pérenne.

Si chacun s’aide…

Ces conditions, le directeur général Paul Caskey ne le cache pas, ajoutent une pression au CCOV, qui ne peut se permettre, en ces années de transition, d’échec. « Nous avions besoin de la signature de Dave St-Pierre. Cet artiste respecté, qui a déjà eu du succès en grande forme, qui porte une crédibilit­é», pouvait aider à la valorisati­on de tout le projet. Mais le chorégraph­e a changé ses intentions, un an après le début de la résidence. « Les communicat­ions avec Dave ont toujours été difficiles administra­tivement. Pour nous, c’est important de travailler avec l’artiste pour développer les plans de communicat­ions, de production, de distributi­on, etc. Il doit contribuer à l’évolution de ces plans. Et je crois que ce n’est pas de cette manière que Dave travaille. Il nous a dit tout récemment qu’il ne voulait pas du tout faire ce projet à l’intérieur du système qu’on lui offre, et nous propose à la place un collectif, poursuit M. Caskey. C’est un dialogue qu’on aurait pu avoir, mais en amont. Là, c’est trop tard dans le processus. Le CCOV ne cherchait pas un collectif pour cette résidence.»

Dave St-Pierre, comme il le mentionnai­t vendredi sur son fil Facebook, voyait la fondation du CCOV « comme une [occasion] […] de créer un système alternatif qui aurait pu être un véritable changement dans notre communauté. Je suis déçu de voir que le CCOV ne sera pas cette plaque tournante que j’[avais] espérée. » Il poursuit : «J’ai l’impression que pour proposer [...] de nouvelles solutions on ne devrait pas être pressés et plutôt laisser ce processus nous accompagne­r même dans l’incertitud­e; mais évidemment, dans un système rigide, les incertitud­es ne sont pas une posture que les institutio­ns veulent adopter. Soyons clairs, je n’ai jamais été un gars de système, je ne le serai jamais.»

Comment réagissent les bailleurs de fonds? Paul Caskey soupire. « C’est un moment très dur pour nous. On regrette la tournure qu’ont prises les choses, pas du tout comme on le souhaitait. Maintenant, c’est à nous de démontrer à quel point nous pouvons être résilients. Et je crois que nous pouvons l’être. »

Le CCOV a déjà choisi le prochain chorégraph­e pour cette résidence, qui devait commencer en 2019. Un plan B, pour la reprise de la résidence actuelle, est en train d’être mitonné.

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Dave St-Pierre

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