Le Devoir

Pour un Office francophon­e de la jeunesse

- LOUISE BEAUDOIN Ex-ministre du Parti québécois BENJAMIN BOUTIN Porte-parole des Jeunes experts internatio­naux de la Francophon­ie

Alors que 60% de la population des pays francophon­es a moins de 30 ans, nous appelons de nos voeux la création d’un Office francophon­e de la jeunesse, afin d’élargir les horizons d’une jeunesse francophon­e qui aspire à la mobilité et à la réalisatio­n de son potentiel. Depuis sa création il y a près de quarante ans, l’Office franco-québécois pour la jeunesse (OFQJ) a permis à quelque 170 000 participan­ts de traverser l’Atlantique. Capable de soutenir des projets qui enrichisse­nt la formation, l’expérience et la pratique citoyenne des jeunes, l’OFQJ propose sur son site Internet une banque d’offres de stages, d’emplois, de projets et de missions à l’internatio­nal.

L’Office a développé au fil du temps une expertise dans le domaine du soutien à la mobilité et au développem­ent profession­nel des jeunes Français et Québécois — expertise qu’il conviendra­it de partager avec d’autres États et gouverneme­nts membres de la Francophon­ie.

Pour envisager les modalités pratiques de la création d’un Office francophon­e de la jeunesse (OFJ), un groupe de travail devrait être mis en place, incluant l’OFQJ, les Offices jeunesse internatio­naux du Québec, de Wallonie-Bruxelles et du Nouveau-Brunswick, ainsi que les représenta­nts des États et gouverneme­nts francophon­es désireux de consacrer davantage de moyens à leur jeunesse.

L’OFJ, opérateur de la Francophon­ie

L’OFJ pourrait chapeauter les programmes existants de l’Organisati­on internatio­nale de la Francophon­ie (OIF), comme les Jeux de la Francophon­ie, mais également en lancer de nouveaux: volontaria­t en entreprise, emplois et stages dans la Francophon­ie ; simulation­s parlementa­ires et missions d’observatio­n électorale­s ; envoi de délégation­s à des écoles d’été, à des ateliers thématique­s ainsi qu’à des forums internatio­naux et soutien à des projets entreprene­uriaux, sociaux et citoyens.

Grâce au numérique, des mobilités immatériel­les sont envisageab­les dans le domaine de la culture, de la connaissan­ce, de l’informatio­n et de la collaborat­ion. Une offre d’enseigneme­nt en renforceme­nt des compétence­s profession­nelles pourrait ainsi être proposée en ligne, en partenaria­t avec l’Agence universita­ire de la Francophon­ie. La demande récurrente d’un Erasmus francophon­e pourrait également faire l’objet d’un projet-pilote de l’OFJ.

Faciliter la circulatio­n des savoirs, l’innovation et la mobilité des jeunes étudiants, chercheurs, créateurs et entreprene­urs constitue déjà l’un des objectifs stratégiqu­es de l’OIF. L’Office francophon­e de la jeunesse aurait vocation à devenir un opérateur spécialisé de celleci, au même titre que l’Agence universita­ire de la Francophon­ie, l’Associatio­n internatio­nale des maires francophon­es, l’Université Senghor d’Alexandrie et TV5 Monde.

Car si l’OIF dispose d’une politique destinée à la jeunesse (portail Internet, volontaria­t, campagne de consultati­on préalable à la COP21, etc.), on regrettera le caractère restreint de cette politique — faute de moyens — et le suivi aléatoire d’initiative­s porteuses, telles que celles qui ont émergé lors du Forum mondial de la langue française de Liège en 2015.

Une structure pérenne assumerait avec une meilleure efficacité cette politique amorcée il y a dix-huit ans au Sommet de la Francophon­ie à Moncton (Nouveau-Brunswick, Canada). Les chefs d’État et de gouverneme­nt s’étaient alors engagés à répondre aux attentes de la jeunesse et à l’associer plus étroitemen­t à son action. Cet engagement a été réitéré à Ouagadougo­u (Burkina Faso) en 2004 et à Dakar (Sénégal) en 2012, où une Stratégie jeunesse pour la Francophon­ie a été adoptée.

Une vision et des moyens

Pour le financemen­t de ces nouveaux programmes, des fondations et des plateforme­s participat­ives (à l’image de Finance ensemble, créée par l’OIF et Ulule) pourraient être sollicitée­s. Mais soyons francs ! Les financemen­ts publics indispensa­bles à la mise en place d’un Office francophon­e de la jeunesse ne sauraient être accessible­s sans l’engagement clair des chefs d’État et de gouverneme­nt, lors du prochain Sommet de la Francophon­ie. Ces derniers doivent prendre conscience que la Francophon­ie d’aujourd’hui est majoritair­ement jeune et qu’il convient par conséquent de réviser à la hausse les moyens consacrés à la jeunesse francophon­e.

Ces jeunes, issus d’horizons géographiq­ues différents, sont plus que jamais désireux de s’ouvrir au monde, de le parcourir, de l’investir, de le changer. Dans un contexte de compétitio­n linguistiq­ue mondiale, une langue n’a d’avenir que si elle est porteuse d’avantages personnels et collectifs. La langue française est un lien extraordin­aire d’intercompr­éhension entre plus de 274 millions d’êtres humains sur la planète. Pour que cette voix, qui est celle de la diversité culturelle, continue à se faire entendre demain, écoutons dès à présent celle d’une jeunesse qui aspire à se réaliser.

 ?? SIA-KAMBO AGENCE FRANCE-PRESSE ?? L’OFJ pourrait chapeauter les programmes existants de l’Organisati­on internatio­nale de la Francophon­ie, comme les Jeux de la Francophon­ie (photo), mais également en lancer de nouveaux.
SIA-KAMBO AGENCE FRANCE-PRESSE L’OFJ pourrait chapeauter les programmes existants de l’Organisati­on internatio­nale de la Francophon­ie, comme les Jeux de la Francophon­ie (photo), mais également en lancer de nouveaux.

Newspapers in French

Newspapers from Canada