Le Québec doit protéger ses aînés, où qu’ils soient, dit Marguerite Blais
La proposition gouvernementale reste insuffisante, dit l’ancienne ministre libérale
L’ancienne ministre des Aînés et députée libérale Marguerite Blais juge insuffisant l’amendement proposé au projet de loi 115 qui instaurerait la dénonciation obligatoire des cas de maltraitance dans les centres d’hébergement et de soins de longue durée (CHSLD).
Jugeant la mesure trop timide, l’ancienne ministre a insisté, en entrevue à La Presse canadienne jeudi, sur l’importance de ne pas « faire les choses à moitié».
Quiconque est témoin d’un mauvais traitement devrait être dans l’obligation de le dénoncer, que ce soit en CHSLD ou ailleurs, sous peine de sanction, a-t-elle dit.
« Quand on a des projets de loi de cette nature, qui touchent les humains vulnérables […] il faut toujours que ce soit tolérance zéro. On ne peut pas les faire à moitié; il faut y aller, il faut que ça ait du mordant », a dit Mme Blais.
«Est-ce qu’on va adopter un projet de loi et se dire: “Ah ben mon Dieu, il y en a eu [de l’abus] dans une ressource intermédiaire! Ah mon Dieu, il y en a eu aussi chez une personne vulnérable dans un hôpital qui attendait une place en CHSLD ! Ah mon Dieu, on a dénoncé, mais la personne est partie, elle n’a pas eu de sanctions, c’est comme avant?» C’est pour ça que c’est important», a-t-elle ajouté.
Aucune sanction pénale n’apparaît dans le projet de loi 115 pour punir ceux qui maltraitent les personnes âgées.
Les contrats de travail, les ordres professionnels et le Code criminel prévoient généralement des sanctions en cas d’abus, a expliqué la ministre responsable des Aînés, Francine Charbonneau.
« On en a des sanctions ; on a des sanctions criminelles, administratives et civiles, elles existent. Elles existent maintenant et elles vont exister demain », a-t-elle dit.
Le projet de loi 115, déposé en octobre, avait été qualifié par plusieurs de «coquille vide» parce qu’il n’obligeait pas le signalement des mauvais traitements.
Le président du Conseil pour la protection des malades (CPM), Paul Brunet, avait déclaré en janvier que les animaux étaient mieux traités que les personnes âgées, rappelant qu’en 2015 le gouvernement avait adopté une loi visant à assurer le bien-être des animaux et à punir sévèrement les contrevenants, passibles de lourdes amendes.
L’Association québécoise des retraités des secteurs public et parapublic (AQRP) et l’Association québécoise de défense des droits des personnes retraitées et préretraitées (AQDR) avaient réclamé elles aussi d’inclure dans la loi l’obligation de dénoncer tout geste de maltraitance envers un aîné.
Se disant sensible aux arguments des groupes, Mme Charbonneau a déposé un deuxième amendement jeudi. Celui-ci mentionne que «le gouvernement peut, par règlement, déterminer que l’obligation de signalement prévue à l’article 18.1 s’applique à l’égard d’autres personnes recevant des services de santé et des services sociaux».
« Moi, je dirais que, si par règlement tu as l’intention, potentiellement, de faire ça, c’est que tu constates déjà qu’un jour tu auras peut-être à agir ailleurs que dans les établissements qui sont nommés, soit les CHSLD», a réagi le député caquiste François Paradis.
«Alors, si tu présumes que, faisons-le maintenant, la loi est là, la loi est ouverte, on en discute», a-t-il ajouté.
L’étude des deux amendements a été suspendue jeudi, à la demande de l’opposition officielle, qui souhaite en discuter en caucus.
En vertu du projet de loi 115, les établissements publics et privés qui accueillent ce type de clientèle devraient se doter d’une politique contre la maltraitance des aînés.