Le Devoir

Québec a les moyens d’indemniser Pétrolia, affirme Carlos Leitão

- ALEXANDRE SHIELDS Avec Marco Bélair-Cirino

Le gouverneme­nt dispose de la marge de manoeuvre budgétaire nécessaire pour offrir une compensati­on à Pétrolia et Corridor Resources, a soutenu jeudi le ministre des Finances, Carlos Leitão. Selon ce qu’a révélé Le Devoir, les partenaire­s de Québec dans le projet pétrolier sur Anticosti entendent réclamer 200 millions pour la rupture du contrat.

«Nous avons les marges nécessaire­s pour renégocier ce contrat, qui était par ailleurs un très mauvais contrat», a fait valoir jeudi matin le ministre Leitão. Selon ce qu’il a précisé, le plus récent budget du gouverneme­nt Couillard permettrai­t d’utiliser des fonds publics pour indemniser les pétrolière­s Pétrolia et Corridor Resources, notamment à même les provisions pour éventualit­és. «Nous sommes très à l’aise», a-t-il assuré.

Est-ce que le gouverneme­nt pourrait accéder aux demandes de départ des deux entreprise­s, qui s’élèveraien­t à plus de 200 millions de dollars ? «Nous avons des marges importante­s qui nous permettron­t de faire face à de telles éventualit­és», s’est contenté de répondre M. Leitão.

Porte de sortie

L’important, selon lui, est de négocier «une porte de sortie» pour l’État québécois, engagé depuis 2014 dans «un contrat très mal ficelé» signé par le gouverneme­nt péquiste de Pauline Marois.

Québec avait alors accepté — après avoir négocié avec l’ancien premier ministre Lucien Bouchard, négociateu­r de Pétrolia — d’accorder une valeur de 200 millions de dollars aux 38 permis cédés par Pétrolia et Corridor Resources à la Société en commandite Hydrocarbu­res Anticosti. Le gouverneme­nt s’était également engagé à injecter 56,7 millions de dollars dans un programme de recherche de pétrole et de gaz de schiste sur l’île.

Selon les détails du contrat, qui n’a jamais été rendu public, le gouverneme­nt péquiste a aussi accordé un peu plus de 13 millions à Corridor afin d’acquérir une plus grande participat­ion dans Hydrocarbu­res Anticosti.

Or, ce projet ne passe tout simplement pas chez les Québécois, selon Carlos Leitão. « Nous constatons qu’il y a zéro acceptabil­ité sociale pour un tel projet. C’est donc dans l’intérêt public de négocier une entente équitable pour les deux parties», a-t-il expliqué jeudi.

Potentiel hypothétiq­ue

Le potentiel pétrolier du sous-sol d’Anticosti n’a jamais été démontré, malgré des décennies de travaux d’exploratio­n. Le gouverneme­nt Couillard a par ailleurs offert son appui à la candidatur­e de la municipali­té de L’Île-d’Anticosti, qui souhaite que la plus grande île du Québec soit inscrite au patrimoine mondial de l’UNESCO.

Québec a aussi promis de mettre fin à tous les projets de recherche d’énergies fossiles et de protéger intégralem­ent l’île d’ici 2020. Il pourrait pour cela devoir négocier avec Junex, qui détient cinq permis d’exploratio­n sur Anticosti. Interpellé­e par Le Devoir, l’entreprise n’a pas voulu commenter le dossier jeudi.

Martine Ouellet, qui était ministre des Ressources naturelles au moment de la signature du contrat avec Pétrolia et Corridor, a pour sa part rejeté l’idée d’indemniser les deux entreprise­s jeudi. «Ce n’est pas au gouverneme­nt et aux contribuab­les de payer des compensati­ons pour l’île d’Anticosti », a-t-elle dit, jugeant que ce projet serait «non rentable».

La députée solidaire Manon Massé a exigé la divulgatio­n de l’entente, en plus de rejeter elle aussi l’idée de verser des millions de dollars de «fonds publics» à Pétrolia. L’entreprise bénéficie déjà de l’appui du gouverneme­nt, qui est son «premier actionnair­e». Ressources Québec a notamment versé 12,3 millions pour le projet d’exploratio­n gazière Bourque, en Gaspésie.

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SOURCE PIERRE LAHOUD Québec a promis de mettre fin à tous les projets de recherche d’énergies fossiles et de protéger intégralem­ent l’île d’ici 2020. Il pourrait pour cela devoir négocier avec Junex.

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