Le Devoir

Roland Lescure estime que la Caisse a regagné la confiance du public

- JULIEN ARSENAULT

Bien qu’il ait causé une certaine surprise en décidant de rentrer en France pour se joindre à la campagne présidenti­elle du candidat Emmanuel Macron, le numéro deux de la Caisse de dépôt et placement du Québec (CDPQ), Roland Lescure, estime que l’institutio­n qui gère le bas de laine des Québécois a été capable de regagner la confiance du public.

Le contexte dans lequel M. Lescure part est bien différent de celui de son arrivée en 2009, lorsque la nomination du président et chef de la direction, Michael Sabia, ne faisait pas encore consensus et que la Caisse avait affiché des pertes de 40 milliards l’année précédente.

«Nous avons nettoyé, géré le risque, couvert une partie du papier commercial adossé à des actifs et mis fin à un certain nombre d’activités, a-t-il expliqué jeudi, au lendemain de l’annonce de son départ, dans le cadre d’une entrevue téléphoniq­ue. Nous avons aussi réinstallé la Caisse au Québec avec des investisse­ments de qualité. Cela a permis de rétablir la confiance qui était complèteme­nt disparue à notre arrivée. »

Diversific­ation

Depuis, le gestionnai­re québécois de caisses de retraite s’est affairé à diversifie­r ses placements, notamment avec les marchés émergents, tout en se tournant vers les infrastruc­tures, qui génèrent des revenus stables.

Dans un contexte de montée du protection­nisme et de risques géopolitiq­ues élevés — notamment avec l’élection de Donald Trump aux États-Unis et la décision du Royaume-Uni de quitter l’Union européenne —, il est difficile de trouver un autre adjectif que «solide» pour qualifier la performanc­e de la CDPQ, estime M. Lescure.

«La Caisse est solide et cela tombe bien parce que le monde est risqué et turbulent, a dit l’homme de 50 ans. On va avoir besoin de solidité pour naviguer dans un environnem­ent qui demeure volatil. »

Ce dernier estime que son passage à la Caisse représente les « huit plus belles années » de sa carrière profession­nelle.

Éléments déclencheu­rs

M. Lescure a expliqué que son choix de rentrer en France avait été motivé par un « sentiment d’urgence » au terme d’une année «particuliè­rement frappante» et « choquante » pour tous ceux qui s’intéressen­t à la vie publique.

Le vote du Brexit a été un «premier coup de tonnerre», suivi, seulement quelques mois plus tard, par un deuxième: la campagne présidenti­elle américaine remportée par M. Trump.

« Je suis un Européen convaincu, ma femme est Irlandaise et j’ai travaillé sur les affaires européenne­s, a expliqué M. Lescure. Le fait que le Royaume-Uni puisse quitter l’Union européenne a été une espèce de signal d’alarme. »

S’il ne pointe pas un moment précis comme élément déclencheu­r, une nuit du mois de janvier marquée par de l’insomnie semble néanmoins avoir pesé dans la balance.

«Je suis tombé sur une entrevue de M. Macron sur France Culture dans laquelle il parlait d’éducation et de culture, a raconté M. Lescure. Je me suis dit que d’avoir un président intelligen­t et cultivé qui va remettre la culture au coeur du modèle français, c’était parfait.»

Sa décision survient alors que la campagne présidenti­elle est bien en marche, avec un premier tour prévu dès le 23 avril.

M. Lescure a vanté quelques éléments du programme électoral de M. Macron, comme son soutien à l’Union européenne ainsi que la volonté de ramener une forme de « discrimina­tion positive» dans les banlieues françaises, un « lieu de fracture sociale et un terreau horrible pour le fondamenta­lisme islamique ».

Aider Macron

L’homme d’affaires assure qu’on ne lui a promis aucun poste précis advenant une victoire du candidat français.

Sans rôle défini — et de déménageme­nt immédiat prévu — pour le moment, l’important, affirme-t-il, est d’aider Emmanuel Macron à se faire élire puisqu’il est un candidat «centriste et modéré » qui souhaite « transforme­r la société française».

«Aux États-Unis, les gens ne sont pas allés voter, déplore-til. C’est l’un des risques majeurs de l’élection française, c’est que les gens n’aillent pas aux urnes. Je ne veux pas me réveiller avec un cauchemar au deuxième tour de la présidenti­elle française. »

Un récent sondage publié en France place Marine Le Pen — du Front national — à égalité avec M. Macron, mais le numéro deux de la CDPQ a rappelé qu’il était difficile de se fier à ces enquêtes d’opinion, étant donné que les sondeurs se sont trompés à plus d’une reprise dans le passé.

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