Le Devoir

Oui à l’école communauta­ire

- FERNAND LAVIGNE

Le projet récemment mis de l’avant afin d’adapter l’école aux besoins de l’heure consiste en une aventure aussi ambitieuse que nécessaire. Bien sûr, certains manifester­ont leurs réserves puisque des chasses gardées seront en jeu. En contrepart­ie, la perspectiv­e d’avenir de l’école conviviale au profit de sa communauté devrait susciter l’intérêt, et une participat­ion intensive, afin de préciser un plan de relance pour une institutio­n devenue désuète, mais cruciale à l’essor du Québec.

Tout projet requiert son financemen­t, soit par de l’argent frais ou par des économies d’efficience. À cette fin, transforme­r l’école en un centre multifonct­ionnel municipal permettrai­t de réaliser des économies substantie­lles étant donné qu’actuelleme­nt, leur taux d’occupation dans le temps est déplorable. De même qu’un certain nombre d’édifices sous la gouverne des villes ou des municipali­tés sont également sousutilis­és pendant les heures de classe à l’école.

Des espaces à multiples usages accessible­s à la communauté, voilà un moyen efficace de réduire les coûts afin de mieux desservir la collectivi­té. En fait, il ne suffit donc pas de revoir la conception et l’aménagemen­t de l’école uniquement en regard de sa vocation première, mais de rendre également disponible­s en tout temps des locaux pour des initiative­s communauta­ires.

Dans l’ensemble, le taux d’occupation dans le temps de nos écoles primaires et secondaire­s est déplorable. En effet, pour des fins scolaires, ces établissem­ents maintenus à grands frais sont occupés moins de 200 jours par année et libres en soirée. Les activités autres qu’éducationn­elles, peu nombreuses, sont hors de la mission d’une commission scolaire. Par ailleurs, les villes et les municipali­tés possèdent de même des installati­ons récupérabl­es pour fin éducationn­elle ou communauta­ire.

Des structures anachroniq­ues

Dans l’optique de l’école communauta­ire, la gestion des édifices devra être confiée aux municipali­tés ou aux organismes paramunici­paux. Cependant, les commission­s scolaires, dans leur forme actuelle ou révisée, conservero­nt la gestion du personnel enseignant ainsi que le transport des élèves.

Pour l’histoire, les commission­s scolaires, instituées à l’origine en fonction d’impératifs linguistiq­ues et religieux, légitimes à l’époque, ont perdu depuis leurs finalités d’origine. Elles sont devenues anachroniq­ues dans leur forme actuelle. Ce mode de gestion fait figure d’exception, en marge de meilleures pratiques de gestion intégrées ailleurs en Amérique comme en Europe.

Au Québec, le transfert des installati­ons scolaires a déjà été proposé et bien reçu dans certains milieux. Ainsi, le maire Coderre a exprimé le désir de considérer la prise en charge de ces infrastruc­tures. Actuelleme­nt, Montréal doit négocier des ententes avec deux commission­s scolaires aux fins d’activités sportives.

En région, le principe offre des avantages d’autant plus intéressan­ts, puisqu’à l’intérieur des paramètres actuels, des villages peinent à garder leur école locale. Or, un centre multifonct­ionnel adapté à leurs nécessités devient donc une solution concevable.

Enfin, on répète qu’il faut un village pour élever un enfant, soit. Encore faut-il que le village existe, qu’on lui trouve un centre, un sens commun. Bref, un point d’attache identitair­e, l’âme de la communauté. Comme l’a si bien décrit le regretté Fernand Dumont: « L’héritage de la Révolution tranquille a aussi eu ses effets pervers, soit la perte de lieux d’ambitions communauta­ires.» D’où l’on doit attribuer la cause principale de l’état anémique de la responsabi­lité individuel­le en manière de vivre en collectivi­té.

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