Le Devoir

Première victoire de Trump au Congrès

- IVAN COURONNE à Washington

Le président américain, Donald Trump, a engrangé un succès jeudi au Congrès, avec l’adoption de justesse par la Chambre des représenta­nts d’un texte de remplaceme­nt de la loi emblématiq­ue de Barack Obama sur la santé.

Il efface ainsi son échec du 24 mars, quand, faute de consensus au sein de la majorité et malgré de fortes pressions de sa part, les républicai­ns avaient été forcés de retirer une première version de la loi.

«Ce sera une victoire incroyable lorsque cela passera au Sénat », s’est félicité Donald Trump dans la roseraie de la Maison-Blanche, où les élus républicai­ns l’avaient rejoint juste après le vote pour saluer cette étape «historique».

«Ça a vraiment permis de rassembler tout le Parti républicai­n», a dit le président, auquel les élus, rayonnants, ont rendu un hommage appuyé.

Vers un débat au Sénat

«Les quatre prochaines années seront formidable­s, et les huit prochaines aussi, mais nous allons commencer par une grande première année », a-t-il ajouté, satisfait d’avoir commencé à remplir l’une de ses principale­s promesses de campagne.

À ses côtés, le président de la Chambre, le quadragéna­ire Paul Ryan, a expliqué qu’il avait connu quatre présidents différents, mais qu’il n’en avait jamais vu aucun d’aussi impliqué. «C’est un grand jour, mais seulement une étape du processus », a prévenu Paul Ryan.

Le vote final, très serré, illustre l’aspect controvers­é du texte actuel: 217 voix contre 213. Les 193 démocrates ont voté non, et 20 républicai­ns ont fait défection. L’annonce des résultats a été saluée par une ovation républicai­ne dans l’hémicycle. Le débat se déplace désormais à la chambre haute du Congrès, le Sénat, où la loi est considérée comme inacceptab­le en l’état y compris par plusieurs sénateurs républicai­ns.

La loi «doit être examinée avec prudence», a souligné le sénateur Lindsey Graham. Son collègue Bob Corker a prédit au moins un mois de débat, et une révision complète.

Changement­s

Sur le fond, la loi reviendrai­t sur plusieurs acquis d’Obamacare, adoptée en 2010: les Américains ne seraient plus obligés de souscrire une assurance maladie et n’auraient plus à payer d’amende en cas de non-couverture; les financemen­ts publics de Medicaid, le programme fédéral d’assurance pour les plus modestes, seraient progressiv­ement réduits; et la couverture minimum instaurée par Obamacare serait allégée, à la discrétion des gouverneur­s des 50 États fédérés, au risque de faire payer plus aux personnes ayant des antécédent­s médicaux, ou de ne plus couvrir certains soins, comme les soins de maternité ou les hospitalis­ations.

«Si nous adoptons cette loi, des gens vont mourir », a prévenu l’élu démocrate John Conyers. Cette loi «ne vise qu’à transférer d’énormes sommes des travailleu­rs vers les Américains les plus riches », a dénoncé le sénateur Bernie Sanders, soulignant les suppressio­ns d’impôts contenues dans la réforme.

Un rapport initial du bureau du budget du Congrès avait estimé que la réforme républicai­ne conduirait 14 millions d’Américains à ne plus être assurés dès 2018, effaçant la majeure partie des gains réalisés sous Obamacare. On attend un nouveau chiffrage du texte républicai­n, surnommé «Trumpcare» par l’opposition.

Si la réforme pourrait permettre aux assureurs de proposer des assurances « light » et donc moins chères, elle devrait renchérir les tarifs pour de nombreux Américains, surtout ceux proches de la retraite, car les aides fédérales baisseraie­nt dans l’ensemble. Les États, faute de fonds, devraient aussi rejeter certains assurés modestes de Medicaid.

Spirale infernale

Aux États-Unis, environ la moitié des personnes sont assurées par leur employeur ; elles ne seraient pas directemen­t concernées par la réforme républicai­ne.

La cible est le marché «individuel», des millions de travailleu­rs qui doivent acheter une assurance seuls, sans appartenir à un groupe, et qui grâce à Obamacare bénéficien­t d’aides importante­s.

Les républicai­ns affirment que le marché individuel créé par Obamacare est dans une spirale infernale. De plus en plus d’assureurs se retirent de ce marché peu lucratif, où les prix augmentent inexorable­ment.

C’est l’argument de Donald Trump: de toute façon, Obamacare s’écroulera sous son propre poids.

«C’est clair que c’est un échec, c’est mort, a-t-il dit à la Maison-Blanche. On va l’achever. »

Ces événements ont fait passer au second plan un accompliss­ement concret : le Congrès a financé jeudi l’État fédéral jusqu’au 30 septembre, fruit de négociatio­ns réussies entre républicai­ns et démocrates.

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MANDEL NGAN AGENCE FRANCE-PRESSE « Ce sera une victoire incroyable lorsque cela passera au Sénat», s’est félicité Donald Trump dans la roseraie de la Maison-Blanche.

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