Le Devoir

Cent années enfin numérisées

Les anciens numéros du Devoir désormais disponible­s sur le Web

- JEAN-FRANÇOIS NADEAU

De sa fondation en 1910 jusqu’en 2009, le journal Le Devoir est désormais accessible à tous en ligne. Pour venir à bout de kilomètres de pages mises bout à bout, il a fallu cinq mois de numérisati­on et neuf mois de traitement­s de ces imposants fichiers par une quarantain­e d’artisans attachés à Bibliothèq­ue et Archives nationales du Québec (BAnQ)

«On a tout numérisé d’un bloc, à partir des microfilms», explique Claire Séguin, directrice de la Collection nationale et des collection­s patrimonia­les. S’il fallait auparavant souvent compter sur la chance pour trouver un texte ancien, il est désormais possible de compter sur des recherches très précises grâce aux outils numériques.

Des recherches numériques très précises peuvent donc désormais être faites dans l’ensemble des numéros. Les chercheurs et les curieux sont aux anges, comme en témoignent des messages d’appréciati­on reçus immédiatem­ent à la suite de sa mise en ligne. «Vous ne pouvez pas imaginer les commentair­es positifs que nous recevons. C’est un énorme potentiel, notamment pour les enseignant­s », explique Simon Mayer, bibliothéc­aire au développem­ent des collection­s numériques patrimonia­les.

« Le Devoir a toujours suscité un fort intérêt pour la recherche », indique en entrevue Claire Séguin. Et la constituti­on d’une mémoire commune au Québec passe certaineme­nt par la diffusion de la mémoire de l’institutio­n qu’est Le Devoir par de nouveaux médias.

Depuis sa fondation, ce journal représente un témoin privilégié de sa société, observent les spécialist­es de BAnQ. Comme le soulignait André Laurendeau, un de ses plus célèbres rédacteurs en chef, Le Devoir ne s’est jamais constitué en une avant-garde qui se détache complèteme­nt de sa société, mais a plutôt veillé à accompagne­r celle-ci dans son évolution, étant de la sorte tantôt un miroir, tantôt une lumière.

Objet de référence

Le Devoir dénoncera « le coquin », selon la formule de son premier numéro. À ses journalist­es, il offre en tout cas en 1910 un «bel encrier tout neuf », selon les mots de Jules Fournier. Il y a un ton et une vision qui émanent des premiers numéros dirigés par cet orateur bouillant qu’était Henri Bourassa. Le journal se veut d’abord une feuille de combat. Il va s’institutio­nnaliser, mais sa tradition se maintient. Son élan initial le conduit souvent à défendre des visées réformiste­s au fil de l’histoire.

Qu’est-ce qui a frappé l’équipe chargée de le rendre disponible dans la planète Web? Mille choses… « Le frère Marie-Victorin utilisait Le Devoir comme tribune pour ses recherches », observe Simon Mayer, bibliothéc­aire au développem­ent des collection­s numériques patrimonia­les. « Dans les années 1980 du “Québec inc.”, on voit que les nouvelles économique­s augmentent dans le journal, qui publie même, pendant quelques années, un magazine économique. Dans les années 1970, on trouve beaucoup de préoccupat­ions pour le patrimoine. » Les intérêts suscités par ses pages sont parfois étonnants: «On a des chercheurs qui sont fous de joie de pouvoir consulter enfin en ligne le journal parce qu’ils s’intéressen­t à la planificat­ion des naissances ! »

En 1966, Le Devoir a été le premier grand quotidien québécois indexé en raison de l’intérêt qu’il représenta­it pour la recherche et pour l’informatio­n du public en général. Un demi-siècle plus tard, il continue de susciter la même attention générale comme objet de référence.

Une entente pour la diffusion des archives du Devoir avait été signée il y a un moment avec l’ancien directeur du journal. « Il y avait une belle ouverture de Bernard Descôteaux en ce sens. Il était favorable à la diffusion», explique Claire Séguin.

Les collection­s de BAnQ comptent environ 6000 titres différents pour les magazines et les journaux. À ce jour, 306 ont été numérisés et rendus disponible­s à la consultati­on. «Le papier, jusqu’à présent, est ce qui résiste le mieux » à l’usure du temps, note au passage la directrice de la Collection nationale et des collection­s patrimonia­les à l’intention de ceux qui voudraient croire trop vite que la vie utile du papier est terminée.

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ARCHIVES LE DEVOIR La une du Devoir du mercredi 30 décembre 1970

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