Le Devoir

Québec pourra utiliser les fonds fédéraux pour offrir du soutien aux familles

- HÉLÈNE BUZZETTI Correspond­ante parlementa­ire à Ottawa Avec Marie Vastel

Le gouverneme­nt de Justin Trudeau respectera sa parole en matière de fédéralism­e asymétriqu­e, du moins en partie. Il permettra au Québec d’injecter l’argent lui étant imparti dans le cadre du nouveau programme fédéral de garderies dans les priorités qui seront les siennes, pourvu qu’elles prennent la forme d’une aide directe à la famille. Les répits destinés aux parents d’enfants handicapés, par exemple, pourraient s’en trouver gagnants.

Les libéraux fédéraux avaient promis dans leurs deux précédents budgets de consacrer 7,5 milliards de dollars sur 11 ans pour financer la création de places en garderie à travers le pays. L’entente-cadre conclue lundi avec les provinces et territoire­s viendra baliser les négociatio­ns à venir sur l’utilisatio­n de cet argent. Le Québec, dont la part s’élèvera à 88 millions de dollars par année d’ici 2020, obtient le droit de consacrer l’argent à autre chose.

«Les conditions, il n’y en a pas, a lancé M. Duclos en point de presse. C’est une invitation que le gouverneme­nt canadien lance au gouverneme­nt du Québec de lui faire part de ses priorités de services directs aux familles. On le fait dans le plus grand respect et avec un souci de souplesse.»

En entrevue avec Le Devoir, le ministre Duclos explique que son gouverneme­nt ne voulait pas pour autant verser les millions dans le fonds consolidé de Québec. Pas possible, donc, la redirectio­n de la somme vers la rémunérati­on des médecins ou la réfection des routes. «C’est une question de transparen­ce pour les gouverneme­nts qui ont aussi des comptes à rendre à leurs citoyens. 88 millions par année, c’est quand même beaucoup d’argent. »

Sans présumer des propositio­ns que soumettra Québec, M. Duclos reconnaît que des investisse­ments dans des services de répit destinés aux familles d’enfants autistes ou ayant un lourd handicap — des domaines où les besoins criants ont récemment fait l’objet de reportages — pourraient se qualifier. «J’entends aussi ces idées, dit-il. Ce sont des exemples de services directs à la famille. » À Québec, le ministre de la Famille, Sébastien Proulx, s’est contenté d’indiquer qu’ «on va investir la part qui nous revient dans nos infrastruc­tures sociales et pour les familles».

Avec l’argent, les provinces pourront choisir de créer de nouvelles places, d’augmenter la qualité de places existantes ou d’en réduire le prix pour les parents. Aussi, le chiffre de 40 000 nouvelles places évoqué dans les deux budgets Trudeau n’est-il plus une cible fixe.

Le ministre Duclos a rappelé que le Québec subvention­ne 200 000 places et dépense à lui seul la moitié de toutes les sommes gouverneme­ntales investies au pays dans la garde d’enfants. «40 000 places pour le Québec, ça peut sembler modeste, mais présenteme­nt, il y a environ 100 000 places subvention­nées à l’échelle du pays, hors Québec. Alors 40 000 sur 100 000, c’est une augmentati­on de 40%. C’est quand même significat­if.»

Aucune contrepart­ie financière ne sera exigée des provinces. En 2005, les libéraux de Paul Martin avaient conclu des ententes similaires, sous la direction du ministre Ken Dryden, mais elles avaient été annulées par les conservate­urs de Stephen Harper arrivés au pouvoir l’année suivante. À l’époque, les libéraux projetaien­t de créer 250 000 avec un milliard de dollars par année pendant cinq ans.

Bon prince, le NPD n’a pas voulu critiquer une initiative qu’il promettait lui-même en campagne électorale. «Je ne serai pas pisse-vinaigre», a lancé le député Alexandre Boulerice, qui se désole néanmoins qu’une bonne partie de l’argent promis arrive « dans deux élections générales ». La chef bloquiste Martine Ouellet, elle, estime que le Québec s’en tirerait mieux avec des rapatrieme­nts de points d’impôt pour prévenir toute coupe future «comme on a vécu du côté de la santé».

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SEAN KILPATRICK LA PRESSE CANADIENNE Des enfants ont été mis à contributi­on dans le cadre de l’annonce du ministre fédéral du Développem­ent social, Jean-Yves Duclos, portant sur les garderies.

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